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L’orgue, ce n’est pas si simple !

L'orgue est un instrument unique et complexe ! Cette semaine François Mazouer décompose pour nous cet instrument et nous révèle son fonctionnement.
Publié le 12 septembre 2013

Sans doute nos lecteurs ne sont-ils pas familiers avec l’orgue. C’est à eux que je m’adresse en priorité.

Tout d’abord, chaque orgue, encore plus que tout autre instrument, est une pièce unique : qu’il s’agisse de son buffet (cela se voit…!) ou de ce qu’il contient. Le nombre de plans sonores, donc de claviers, est variable d’instrument à l’autre, la « composition » de l’instrument est pratiquement unique à chaque fois…

 

Charles Tournemire aux claviers de l’orgue Cavaillé-Coll de Ste Clotilde à Paris (avec l’autorisation de Mme Marie-Louise Jacquet-Langlais)
 

Revenons sur ces différents termes.

L’on peut faire une analogie entre un orgue et un ensemble instrumental (formation de musique de chambre ou orchestre symphonique). En effet, l’orgue contient un certain nombre de « jeux » qui sont autant d’instruments que l’organiste a à sa disposition, qu’il peut (ou non) mettre en œuvre chacun à l’aide de « tirants de jeux » situés à la console. L’orgue étant un instrument à vent, un jeu comprend donc une série de tuyaux (un par note) donnant un timbre particulier à une hauteur donnée.

Ces jeux sont regroupés par plans sonores, chaque plan pouvant disposer de son propre buffet. Chaque plan sonore est commandé par un clavier distinct (clavier manuel ou pédalier – clavier joué avec les pieds). Ceci permet de faire dialoguer des plans sonores : récit de soliste et son accompagnement, opposition de timbres et/ou d’intensité… Ceux qui sont familiers avec l’orchestre trouveront des analogies avec l’usage, dans la musique symphonique, des différents pupitres qui le composent (les cordes, les bois, les cuivres – pour les principaux).

La liste des jeux de l’orgue et leur répartition sur les différents plans sonores constitue la « composition » de l’orgue, en quelque sorte sa plaque signalétique.

La voici pour le projet d’orgue de Saint-Louis de Vincennes (35 jeux sur 3 claviers et pédalier) :

 

GRAND-ORGUE POSITIF RECIT EXPRESSIF PEDALE
Bourdon 16 Salicional 8 Flûte ouverte 8 Soubasse 32
Montre 8 Cor de nuit 8 Dulciane 8 Flûte 16
Flûte harmonique 8 Flûte douce 4 Voix céleste 8 Soubasse 16
Prestant 4 Nasard 2 2/3 Flûte 4 Flûte 8
Plein jeu V rangs Doublette 2 Nasard 2 2/3 Bourdon 8
Trompette 8 Tierce 1 3/5 Flageolet 2 Flûte 4
Cromorne 8 Plein jeu III rangs Plein jeu II/III rangs Bombarde 16
Clairon 4 Trompette 8 Bombarde 16 Trompette 8
    Trompette 8 Clairon 4
    Basson – Hautbois 8  


Qu’y voyons nous en première approche ?

  – Les titres des colonnes portent les noms des plans sonores, donc des claviers qui les commandent : le grand-orgue est le clavier principal, le positif, clavier « secondaire », est une réminiscence des anciens orgues positifs du moyen-âge et de la renaissance et le récit un plan sonore dont la disposition (souvent en hauteur) favorise la portée du son et était donc utilisé à l’origine pour faire réciter des jeux solistes ; ce dernier clavier est expressif, c’est-à-dire que ses tuyaux sont enfermés dans une boîte munie de jalousies mobiles permettant de faire des nuances. Les jeux de pédale comprennent l’essentiel des jeux les plus graves pour l’assise harmonique de la musique.

  – Les noms des jeux évoquent à la fois des timbres (par exemple : flûte ou trompette) et des hauteurs exprimées en pieds (un jeu de 4 pieds sonne une octave plus aigüe qu’un jeu de 8 pieds, et un jeu de 16 pieds une octave plus grave).

 

 console de l’orgue historique de Rozay-en-Brie (77) – (c) Philippe Lécossais,titulaire de cet instrument.

Tout l’art du facteur d’orgue consiste à équilibrer la façon dont sonne chaque jeu, seul et relativement aux autres, notamment dans les ensembles de couleurs sonores.

Une des tâches de l’organiste, dans son jeu, est de doser le mélange des jeux et leurs oppositions par le biais de la registration, terme qui est à l’orgue ce que l’orchestration est à la musique symphonique.

Nous reviendrons une autre fois sur les grandes familles de jeux.

 

François Mazouer

12 septembre 2013

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