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La théologie au risque de la création artistique

Viennent de paraître les actes d’un colloque international qui s’est tenu au cours de l’année 2017 à l’Institut Supérieur de Théologie des Arts (Theologicum, Institut Catholique de Paris), à la Faculté de Théologie protestante (université de Strasbourg), ainsi qu’à Florence et aux Etats-Unis. Ce sont les communications de Paris et de Strasbourg que met cet ouvrage à la disposition des lecteurs : un outil précieux qui apporte une pierre attendue pour penser le rapport entre la création artistique et la théologie.
Publié le 04 juin 2018

De quoi s’agit-il au fond ? Rien de moins que de participer à l’élaboration d’une théologie des arts, de tous les arts, ceux des yeux et ceux des oreilles.

Ce livre est divisé en deux grandes parties, l’une consacrée au colloque de l’ISTA de Paris, l’autre à celui de Strasbourg. Selon sa logique propre, chacune poursuit le même but : nourrir la recherche théologique de l’expérience artistique et permettre aux artistes d’approfondir leurs propres routes de création. A la manière d’une œuvre d’art, chacune des parties se présente comme un parcours balisé, toujours plus passionnant au fur et à mesure de la lecture.

Le colloque de Paris s’intitule : « De l’apparaître à l’envol », ou comment l’image de l’oiseau nourrit la théologie. La visée de ce colloque est, en effet, fondamentalement théologique : après avoir posé quelques fondements sur le respect mutuel entre les artistes et les théologiens dans leurs spécificités propres et leurs apports mutuels tant à la pensée qu’à l’acte de création lui-même, l’ouvrage propose quelques étapes artistiques : une belle méditation poétique à partir des psaumes, l’image de l’oiseau dans l’œuvre de Georges Braque, dans la poésie contemporaine, dans la musique, dans l’art photographique de Brancusi. On est ainsi insensiblement conduit vers la théologie proprement dite, l’art étant une « herméneutique en acte de la foi chrétienne » comme le dit Denis Villepelet dans un texte introductif.

La deuxième partie de ce colloque de Paris est plus théologique : la légèreté de l’envol de l’oiseau est ici perçue comme une image de l’Esprit-Saint explorée sous des angles divers : « la vie et l’esprit dans l’Eglise ancienne », l’Esprit-Saint dans l’art florentin et les arts visuels contemporains et enfin une conclusion essentiellement théologique qui approfondit ce qui unit corps et esprit dans la pensée chrétienne : « Que l’Esprit soit intimement lié au corps est comme on le voit une affaire décisive en christianisme » selon le mot conclusif du doyen Jean-Louis Souletie.

Le colloque de Strasbourg était résolument historique : il s’agissait de souligner l’apport important de la Réforme à la création artistique, pas seulement dans le domaine musical mais également dans celui de l’image.  Partant de « l’expérience visuelle de Dieu dans la bible hébraïque », nous sommes invités à une exploration de l’image dans ses diverses fonctions (spéculative, pédagogique, polémique) au cours de l’Histoire du Protestantisme dans ses diverses sensibilités (Luther, Calvin). Le passage par la pensée de Luther sur la musique conduit à une analyse plus théologique avec une exploration de « l’influence de la Réforme sur les arts visuels » y compris dans l’art contemporain. L’ouvrage se conclut sur une évocation de l’Art de la Réforme Catholique, comme un contrepoint qui vient enrichir par contraste, à la manière musicale d’une fugue, le contenu de ce colloque.

Voilà un livre d’une grande densité, passionnant tant pour les artistes que pour les théologiens, les responsables de manifestations de tous ordres dans le domaine de l’art, ceux qui sont chargés de mission dans les diocèses…

On peut regretter, comme cela est précisé dans l’ouvrage, que les illustrations soient absentes de certains articles, mais les contraintes éditoriales sont ce qu’elles sont.

Emmanuel Bellanger
Juin 2018

OUVRAGE 

 

De l’apparaître à l’envol
La théologie au risque de la création artistique


Sous la direction de Denis Hétier et Jérôme Cottin.


Editions du Cerf Patrimoine, mai 2018, 310 pages.     

 

24 euros

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