Eva Asp est née en 1956 à Arvidsjaur, dans le Nord de la Suède. Artiste de formation, elle se consacre parallèlement à l’organisation d’expositions et de séminaires dans différents contextes. Depuis 1995, elle est connue au sein de l’Église de Suède comme l’organisatrice de projets novateurs et originaux, visant à inclure l’art contemporain dans les églises suédoises, avant tout à Stockholm. A travers une discussion autour de trois projets clés – « Pendel Experiment » (L’expérimentation du pendule) « Återkomster » (Retours), et «Konståret » (L’année de l’art) – Eva Asp partage ici son expérience dans le domaine du dialogue entre l’art contemporain et l’Église.
PENDEL EXPERIMENT (« Expérimentation du pendule ») Du 2 au 29 janvier 2010, l’artiste suédoise Monica Sand propose aux visiteurs et aux paroissiens de l’église Saint-Jacob de faire l’expérience de sa balançoire, installée dans la nef de cette église du centre de Stockholm. Grâce à la balançoire haute de 13 mètres – une hauteur qui en rend le mouvement lent, ample et contemplatif – l’artiste met l’accent sur la notion de rythme dans l’espace de l’église, tout en faisant référence à une longue tradition de recherche scientifique autour du pendule, de Galilée à Foucault. Plusieurs concerts et autres évènements sont organisés pendant lesquels les participants sont amener à ressentir l’espace religieux de manière différente le temps de l’exposition. |
D’où vient l’idée de ”Pendel Experiment” ?
L’idée vient exclusivement de l’artiste, qui pendant plusieurs années a travaillé avec la même idée dans différents contextes.
Comment l’artiste, Monica Sand, a-t-elle réagi au sujet de l’installation de son œuvre dans une église ?
C’est elle qui m’a contactée. J’ai réagi avec un enthousiasme modéré car je savais que ce projet étirerait les limites de ce que l’Eglise accepterait peut-être, dans le cadre des expressions innovantes et créatrices. Elle a donc eu l’idée elle-même et elle voulait que cela prenne place précisément dans cette église : à cause de sa structure architectonique il était particulièrement adéquat d’y placer la balançoire. Elle était très contente que ce soit possible de réaliser cela, bien que ce fût tout un processus pour obtenir l’accord de l’Eglise, et c’est là que se trouve ma contribution à ce projet. Et il ne fait aucun doute que cela n’aurait pas était possible sans les activités expérimentales de « Konståret » [« L’année de l’art » ; voir ci-dessous] en 2007-2008, qui a eu des effets très positifs.
Quelles sont vos attentes concernant cette installation ? Quels dialogues et réflexions devrait-elle provoquer ?
L’installation devrait élargir les idées sur ce que sont les expressions « appropriées » dans l’espace de l’église, et élargir l’idée de la contemplation religieuse et des moyens d’entrer en contact avec les différentes couches de conscience qui sont au travail dans le contexte spécial de l’église.
Quelle a été votre première collaboration avec l’Eglise de Suède ?
Mon premier projet avec l’Eglise de Suède était une installation que j’avais faite pour ma paroisse à Stockholm, Maria Magdalena. J’avais été invitée en 1993 par le pasteur à y faire une exposition. A cette époque, c’était inédit dans le monde de l’art ; les artistes « sérieux » étaient alors très hésitants et ils doutaient quant à s’engager dans une coopération avec l’Eglise à cause de la mauvaise réputation de cette dernière, connue pour travailler principalement avec des artistes non-qualifiés. J’ai donc pensé que ce serait une bonne idée que de monter un projet plus grand, qui changerait peut-être cette vision. En ce qui me concerne, c’est là l’origine du projet « Återkomster » [« Retours » ; voir ci-dessous]. J’ai fait un projet pilote, réussi à intéresser une association éducative, et j’ai trouvé les fonds, provenant entre autres de « The Visual Arts Fund » [La fondation pour les arts visuels]. Par coïncidence, un projet similaire, conduit par Stefan C. Ahlenius au sein de l’église Johannes, avait aussi fait une demande de financement, nous avons donc décidé de coopérer et nous avons tous les deux reçu des fonds.
ÅTERKOMSTER (Retours) Återkomster (Retours) est une exposition réunissant du 12 au 26 novembre 1995, 22 artistes dans 12 églises de Stockholm, dont l’idée revient à Eva Asp et à l’artiste C-Stefan Ahlenius. L’objectif était de montrer que l’installation de l’art contemporain dans les églises offre de grandes possibilités, notamment parce que l’art contemporain adresse nombre de questions qui se sont de tout temps trouvées au centre de la religion. La religion comme l’art disent quelque chose de ce que c’est qu’être un être humain. Le titre de l’évènement fait référence au retour du Christ pendant le Jugement Dernier, un thème en résonance avec la fin du siècle. Mais le terme est mis au pluriel car il est l’écho de plusieurs retours : celui de l’image dans le rite religieux aux côté du mot ; celui d’un intérêt renouvelé des artistes pour les thèmes religieux. Un retour qui prend la forme d’un dialogue ouvert et dynamique. |
Quel était l’objectif avec le projet « Återkomster » (« Retours ») ?
Initier une nouvelle réflexion positive sur les usages et les fonctions des expressions artistiques contemporaines dans l’Église de Suède, et mettre en place des exemples positifs concernant la manière d’interagir avec les artistes aujourd’hui ; [le but était aussi] de rétablir un contact entre les artistes et l’Église et de mettre en marche un processus à travers lequel l’Eglise pourrait regagner son statut auprès des artistes visuels. C’était très important – et c’était même une condition de participation – que les églises et les différentes paroisses fassent usage des œuvres d’art exposées, que des discussions soient arrangées, des offices religieux, et que certains sermons soient des dialogues avec les artistes. C’est ce qui a été fait ; nous avons eu un programme exceptionnel pendant cette courte période. C’était la majeure partie de mon travail puisque j’étais responsable de 14 des 15 églises participantes, et aussi de l’office inaugural dans l’église principale, "Storkyrkan", où le doyen de la cathédrale, Caroline Krook (aujourd’hui évêque de Stockholm), composa un office spécial pour la bénédiction des arts. Pour moi il était également important que les artistes soient payés pour leur travail s’ils réalisaient une nouvelle pièce, ou [qu’ils reçoivent] un salaire afin que l’église puisse utiliser leurs œuvres pendant cette période. La documentation photographique a aussi été importante, mais malheureusement rien n’a été fait avec ces documents exceptionnels.
Comment les artistes et les églises ont-ils été choisis ?
Les artistes ont été sélectionnés par rapport à un vaste éventail de qualités. Ils devaient représenter différentes techniques, âges et expressions, et je voulais que ce soit, généralement, de très haut standard. Certains ont été suggérés par le bureau du travail puisque cette organisation participait économiquement au projet. Les églises ont été sélectionnées selon leur volonté de participer et par l’intermédiaire du réseau de mes employeurs ; et puis certaines églises ont été choisies et invitées à cause de leur intérêt au niveau architectural. Il s’est développé une sorte de compétition positive entre les églises, ce qui s’est révélé être très bénéfique pour le projet dans son ensemble.
Quel était l’objectif avec le mélange d’artistes âgés et reconnus avec d’autres plus jeunes et débutants ?
Obtenir un large éventail d’expressions et montrer que ce projet était quelque chose pour tout le monde et que ce n’était pas seulement ce que l’on appelait avant – avec quelque dédain – des « artistes d’église » […]. C’était aussi important de faire participer les artistes confirmés pour qu’il donne le signal qu’il est possible de travailler dans ce champ [l’art dans l’église] ; et engager ainsi un changement de statut de ce milieu.
Est-ce que le dialogue entre les artistes et le personnel des églises a parfois été difficile ?
Seulement à une occasion, lorsque l’un des artistes proposa d’installer une échelle à un endroit où se trouvait une porte près de l’autel, porte par laquelle les pasteurs font leur entrée pour l’office. Cela a créé beaucoup de colère chez une personne, mais ils ont trouvé au sein de l’église une solution en adaptant les emplois du temps. Un autre artiste avait suggéré des œuvres pour une église catholique qui étaient des photomontages assez ironiques du pape dans différentes situations très négatives […]. L’église en question ne pouvait pas les accepter car il s’agit d’une communauté qui consiste de personnes venant du monde entier, parlant de nombreuses différentes langues et ils n’auraient pas pu avoir la possibilité d’expliquer le sens de ces images à tous. J’ai donc choisi d’exclure ces images et je les ai montrées lors d’un séminaire. Cette décision était également motivée par les instructions du contrat signé par les artistes, « de participer au projet avec des œuvres d’art qui peuvent être présentées dans l’espace d’une église ».
Comment décriez-vous la réaction des visiteurs et des membres des paroisses une fois les œuvres installées dans les églises ?
Au-delà de toutes les attentes, la réaction fut massivement positive de la part des médias et du public. L’un des critiques d’art de Dagens Nyheter s’est exclamé « Les artistes sont revenus dans l’église ! » ; ce qui était justement l’un des objectifs du projet : éveiller ce sentiment. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’estime que ce fut un succès. Les membres de la paroisse étaient dans l’ensemble très positifs. Surtout, ceux qui s’étaient au début montrés négatifs ont changé d’attitude ; ce qui fut peut-être un effet du nombre très important de visiteurs, mais aussi parce qu’ils ont fait l’expérience de quelque chose de nouveau et, je pense, vital.
Est-ce que certaines des églises participant à « Återkomster » ont continué le dialogue avec l’art contemporain par l’intermédiaire de commandes ou d’expositions temporaires ?
Oui, d’abord l’association éducative (SKS, l’association éducative de l’Eglise de Suède) a monté un large projet dans la suite de « Återkomster », dans 22 églises pendant toute l’année 1998, appelé « Konststafetten » [« La course de relais de l’art »]. Mais ce projet n’a pas eu le même impact fort, parce que ses organisateurs n’étaient pas tellement engagés dans le monde de l’art et n’avaient pas le même sens de qualité, etc. Et je ne pense pas qu’ils aient fourni le même effort pour que les congrégations participantes utilisent les œuvres durant la période de l’exposition, ce qui avait été l’un des principes majeurs de « Återkomster ». Quelques-unes des églises participantes ont pris l’initiative de projets, avec par exemple des artistes invités, etc. Mais je crois que l’idée dans son ensemble est tombée ou qu’elle ne pouvait pas survivre, à cause du manque de personnes ayant une connexion professionnelle avec le monde de l’art. Pour obtenir un bon résultat, on a besoin de capacités professionnelles, des deux côtés.
KONSTÅRET ("L’année de l’art") Ce projet fait partie d’une recherche plus vaste, concernant la culture dans la capitale suédoise et sa relation aux hommes qui y vivent (« Storstadsprogrammet/Kultur »). Dans ce cadre, l’Église de Suède, désormais séparée de l’Etat, a lancé un programme de recherche adressant, entre autres, les opportunités offertes par l’introduction de l’art contemporain dans l’espace religieux. L’église Saint-Jacob est le lieu où pendant un an, du premier dimanche de l’Avent 2007 jusqu’au 30 novembre 2008, ont pris place toute une gamme d’évènements artistiques. Au final, plus de trente artistes ont installé leurs œuvres dans l’église Saint-Jacob, attirant ainsi un grand nombre de nouveaux visiteurs ; ce qui faisait partie des objectifs de cette expérimentation : attirer par de nouveaux moyens une partie de la population qui est en quête de spiritualité mais à qui les anciennes ou traditionnelles « formules » ne conviennent pas ; et ce sans perdre le message central de la foi chrétienne. |
Comment les artistes ont-ils été choisis pour « Konståret » (« L’année de l’art ») ?
Je voulais avoir un large éventail d’expressions, à la fois des artistes « adorés des gens » et d’autres avec un profil vraiment contextuel et expérimental (comme par exemple Linus Elmes avec son « Imaginary Exhibition »). Le nombre de visiteurs a également varié entre plusieurs milliers et peut-être vingt (j’entends ici les visiteurs venant uniquement pour l’exposition). Mais c’était vraiment important de garder le niveau de qualité haut. Nous avons eu beaucoup de discussions à ce sujet, avec les responsables au sein de l’église, sur le concept de qualité.
Est-ce que les artistes devaient présenter une œuvre avec des connotations religieuses ou pouvaient-ils exposer « n’importe quoi » ?
Ce ne pouvait absolument pas être « n’importe quoi », l’intention principale de l’œuvre ou des œuvres était de coopérer, correspondre, avec le thème de l’église pendant cette période. Ce thème – par exemple « Vie et mort » ou « Le bon berger » – fonctionnait comme un titre vague et le travail des responsables de l’exposition consistait à trouver les œuvres et les artistes qui travaillaient, si je peux dire, dans un esprit similaire. Il fallait avoir à la fois un sentiment et une compréhension personnellement fondés à propos de la signification religieuse du thème et une idée de comment lire les œuvres des artistes, en relation avec leurs intentions (ce qui est bien sûr une question d’interprétation subjective, mais on avait besoin d’une certaine façon du consentement des artistes concernant l’interprétation). Mais je n’ai certainement pas essayé de trouver des œuvres « religieuses » ; une fois qu’elles sont classifiées de la sorte, leur potentiel disparaît, la classification diminue per se la complexité de l’œuvre, elle la place soit dans la catégorie de l’art religieux « utilitaire » (comme le baptistère, crucifix…), soit elle rajoute une couche d’interprétation qui pointe son incapacité à communiquer ce qu’elle devrait communiquer par ses propres moyens. Je pense que je n’aime pas l’expression « art religieux ».
Y avait-il une sorte de « contrôle » sur les différentes œuvres exercé par les responsables de l’Eglise de Suède engagés dans le projet ? Ou peut-être ce que vous appelleriez un « dialogue » entre les pasteurs et les artistes à propos des œuvres qui devaient êtres présentées.
Ils voulaient parfois les contrôler. Mais seulement dans les cas dans lesquels une œuvre pouvait être lue comme contradictoire par rapport aux propres croyances et dogmes de l’Église. Comme par exemple le « Stand-up show for the dead », réalisé par Aida Chehregosha et Markus Krunegård. Parce qu’il n’y a pas de telle croyance dans l’Eglise de Suède – que nous puissions exister dans ce monde après notre mort (comme les esprits, les fantômes…) – nous avons dû renommer l’œuvre « hommage » aux morts, même si l’intention des artistes était que les morts pouvaient vraiment être là et participer au show. Le matériel, documenté dans un film, est vraiment touchant, ce fut en fait une des pièces les plus intéressantes. Mais cela a été vraiment difficile d’obtenir l’accord pour le faire. J’ai dû engager trois différentes personnes pour mener à bien ce projet. Mais mis à part cela, les responsables religieux ne sont pas intervenus dans le processus de création, ce qui a été chanceux.
Et puis si après ils font des interprétations ou des réflexions sur les œuvres, ils le font bien entendu selon leurs propres besoins et connaissances […] Quelque fois cela portait simplement sur le fait de se permettre d’être touché par l’œuvre.
On remarque que la volonté de communiquer à propos des œuvres présentées est très forte : débats-discussions, offices spécifiques préparés avec les artistes autour des œuvres, ou encore le fait que « Konståret » [L’année de l’art] ai commencé avec l’exposition d’œuvres plutôt conventionnelles comme celles de Lena Lervik pour finir avec des installations plus difficiles et conceptuelles telle que "The Sudarium of Saint Veronica" de Leif Elggren. Que pouvez-vous dire au sujet de cet effort pédagogique qui est un processus ? Pourquoi est-ce important et nécessaire ?
Je pense que c’est une condition préalable. Il faut commencer simplement, avec quelque chose facile à comprendre et ensuite, graduellement, cela devient plus compliqué. La chose la plus difficile dans tout le processus (et cela est valable tout au long de mon expérience) et d’obtenir la confiance, que l’on vous laisse faire une déclaration [make a statement] dans l’espace de l’église ; ceux qui sont responsables sont pour la plupart effrayés de ne pas avoir l’initiative et ils ne sont pas non plus habitués à reconnaître les compétences des autres professions. C’est crucial. L’exemple du père Friedhelm Mennekes, si souvent mentionné dans ce contexte, est un exemple solitaire, où vous avez les deux types de connaissance réunis au sein d’une personne. La grande difficulté est pour l’Eglise d’accepter qu’il faut coopérer au sein de ces sujets.
Que diriez-vous de l’attitude des visiteurs entrant dans l’église Saint-Jacob pour voir les expositions ?
Cela dépend. Comme l’entrée n’était pas payante, les gens pouvaient simplement « passer par là » et ne pas ressentir le besoin de rester longtemps comme s’ils avaient payé et voulaient rentabiliser leur ticket d’entrée. C’était un aspect important du projet, que tout soit proposé gratuitement ; de la même manière que pour l’office religieux, les paroissiens ne doivent pas payer pour cela. C’était comme une partie du programme, quelque chose que l’église proposait, avec le même degré de sérieux que pour n’importe quelle manière de prêcher. […] Certainement, l’église confère une sorte de sérénité et de sérieux aux œuvres d’art ; si ces dernières sont à la hauteur (il faut qu’elles soient de bonne qualité), on peut en faire l’expérience de façon plus sérieuse que dans un autre contexte. Je pense que l’on a la chance de réfléchir plus profondément dans ce cadre. Beaucoup d’artistes ont aussi exprimé le fait que leurs œuvres s’épanouissaient le mieux dans l’église. L’une des artistes, Maria Luostarinen, dit qu’elle avait attendu cette opportunité pour montrer une œuvre spéciale (une grande photographie d’un homme assis à une table, la tête appuyée sur la table, cachée dans ses bras […]).
Enfin, quelques questions plus générales au sujet de votre expérience. Est-ce que tous ces différents projets inspirent d’autres églises en Suède ?
Je suis absolument certaine que oui […]. Mais le potentiel n’est pas complètement pris en considération par l’Eglise qui pourrait, à un niveau national, faire beaucoup de choses pour améliorer et mettre en valeur un tel processus.
Le dialogue entre le monde séculaire de l’art contemporain et l’institution religieuse n’est ni facile ni naturel ; diriez-vous que le fait que vous soyez vous-même une artiste est une aide dans la réalisation de ces projets ?
Oui, comme dans tous les projets qui incluent des artistes ; il faut avoir un profond respect et une profonde compréhension des conditions de création qui sont des conditions essentielles au travail de l’artiste. Et de cette manière, il faut réaliser et apprécier les capacités professionnelles et les connaissances connectées à ce type de travail. Aussi, ce n’est pas bien de compter sur la volonté d’un artiste pour faire les choses gratuitement ; et je pense qu’il est très important de faire passer ce message au sein de l’Eglise, entre autres. Le respect donne en retour du respect, aucun des artistes [engagés dans ces projets] n’a jamais essayé de moquer l’Église ou de profiter de l’Eglise d’une façon négative. Ils ont tous été très dévoués et je suis très fière et chanceuse d’avoir eu l’opportunité de travailler avec eux.
Puisque vous avez travaillé à l’installation de l’art contemporain dans les églises depuis un long moment (« Återkomster » a eu lieu il y a quinze ans), pouvez-vous voir une évolution au sein du dialogue entre l’art contemporain et l’Eglise ?
Je crois qu’il y a eu dans la population suédoise un changement vers une attitude généralement plus intéressée et tolérante envers l’Eglise et les sujets religieux dans leur ensemble. Ceci a bien sûr affecté la situation, et plus de personnes, parmi lesquelles des artistes, sont intéressées par le dialogue. […] L’Eglise est aussi plus intéressée par ce dialogue et elle est probablement plus prompte à prendre de plus grands risques, maintenant qu’elle peut se référer aux expériences précédentes. Ces expériences ont été les preuves qu’un dialogue peut fonctionner en tant que signalement d’une ouverture et une adéquation avec l’époque. Il y a aussi un plus grand besoin de s’adapter à un comportement davantage communicatif à un moment où le risque de perdre beaucoup de membres devient de plus en plus une réalité (depuis la séparation de l’Eglise et de l’Etat en Suède, en 2000).
[…]
Comment voyez-vous le futur des expositions temporaires d’art contemporain dans les églises, et l’avenir du dialogue ?
J’espère qu’il continuera, mais j’ai peur que la compétence à choisir parmi les artistes, négocier de bonnes conditions de travail pour les artistes engagés etc., n’est vraiment pas une capacité qui ressort de la chance. J’espère que l’Eglise engagera des commissaires d’exposition compétents, intéressants et différents […] ou que quelques pasteurs, à l’instar du père Mennekes, auront la volonté de s’éduquer vraiment sérieusement afin de mieux connaître ce champ si spécial qu’est celui de l’art contemporain aujourd’hui. Les projets qui réussissent sont construits sur un respect mutuel, la confiance et la compréhension, et on a aussi besoin, des deux côtés, d’une grande capacité et d’une volonté de communiquer – dans le vrai sens du mot.
> Entretien avec Eva Asp réalisé par Caroline Levisse par email en janvier 2010. Traduit de l’anglais.
> Site internet de l’église Saint-Jacques :
http://www.stockholmsdomkyrkoforsamling.se/index.php