« C’est une image de la Renaissance italienne ! »

Publié le 26 mars 2025
Écrit par Sylvie Bethmont-Gallerand
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Vue de l’exposition Letizia Battaglia, château de Tours, Jeu de Paume, jusqu’au 18. 05. 2025©SB

Nous visitons en famille,  ce samedi de mars, l’exposition rétrospective des photographies de Letizia Battaglia (1935-2022) au Jeu de Paume du Château de Tours, et cette exclamation, retentit plusieurs fois, crescendo,  dans l’une des salles. Les photographies exposées là sont particulièrement dures. 

Cette photographe est célèbre pour son travail documenté « à chaud », durant les deux décennies des « années de plomb »  (1970-1990) de la « guerre des années noires » entre les forces de l’ordre et la Cosa nostra (Mafia sicilienne), à Palerme pour le journal local l’Ora. Il pouvait lui arriver selon ses propres mots : « de voir au cours d’une seule journée, cinq hommes morts », tous d’une mort violente, assassinés dans la rue, dans les cours intérieures, dans les maisons.  

Images dures, qu’une distance « artistique » :  le Noir et Blanc crémeux des photographies comme leurs cadrages soignés et artistiques, ne rendent pas pour autant soutenables. 

C’est alors que retentit à plusieurs reprises (au moins cinq fois ! ) cette exclamation : « C’est une image de la Renaissance italienne ! … Si, si, je t’assure c’est une image de la Renaissance italienne » ! 

Je m’approche. Le garçon qui tente de persuader sa jeune amie que la photo qu’ils regardent est « une image de la Renaissance italienne » porte une vingtaine d’année, un visage fin encadré de Dread locks » et un tee-shirt orné de l’image (en Noir et blanc elle aussi) de ce qui m’a semblé être un groupe de musique (Hard Rock je présume). 

Je me suis approchée, curieuse de voir cette  « image de la Renaissance italienne », prise à Palerme par une photographe italienne (certes) dans les années 70 et tirée en Noir et Blanc. 

Alors je vis, une parmi tant d’autres exposées tout autour de cette salle, la photo d’une femme en noir, assise, pleurant sa douleur, soutenant le cadavre allongé d’un jeune homme mort par balles ; un peu de sang a coulé dans la rue où sont massés des hommes légèrement en retrait. 

– « Bravo jeune homme aux Dreads, vous avez l’œil », ai-je pensé.
– « Bravo c’est tout à fait cela », ai-je dit.
Et j’ai continué sur ma lancée, en essayant de ne pas trop faire ma prof d’histoire de l’art chrétien :
– « C’est image semblable au motif de la déploration du Christ mort, ou plutôt de la douleur de la Vierge devant son Fils, Jésus détaché de la croix. C’est un motif très répandu dans la peinture religieuse de la Renaissance italienne, en effet. Cela s’appelle une Pietà. »
– « Ah tu vois ! » Dit-il à sa jeune amie. Puis à moi : « Comme l’appelez-vous ? »
– « Une Pietà. »
– « Ah merci, une Pietà. » Se tournant vers son amie : « Tu vois ! »
Et vers moi  : « Merci, merci ! » (Grand sourire de part et d’autre)
– « C’est moi qui vous remercie. Vous avez l’œil ! »

…Une suite est à venir dans un prochain article de Narthex.fr à propos de l’œuvre photographique de Letizia Battaglia.

Pour aller plus loin

À voir

ACCÈS ET HORAIRES :  Château de Tours 25, avenue André-Malraux 37000 Tours
+33 2 47 70 88 46
Mardi-dimanche : 14 h-18 h Fermeture le lundi.
Plein tarif : 4,20 € Tarif réduit : 2,10 € Gratuit pour les scolaires.

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