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Sermons d’un grand pasteur et ardent défenseur de la foi, Théodore de Bèze (1519-1605)

Dans ce cycle dédié à l'art de l'homélie de son blog Écrits mystiques, Martine Petrini-Poli nous propose d'explorer l’histoire de la prédication chrétienne en tant qu’œuvre littéraire, héritière de la Bible, qui évolue au cours des siècles : des Pères de l’Église au Moyen Âge, du XVIIe siècle à nos jours. Nous vous invitons à découvrir les écrits passionnés et les sermons de Théodore de Bèze, grand humaniste et théologien protestant qui fut le successeur de Calvin à l'Académie de Genève.
Publié le 16 février 2023
Écrit par Martine Petrini-Poli

Théodore de Bèze, né le 24 juin 1519 à Vézelay et mort le 13 octobre 1605 à Genève, est un humaniste, théologien protestant, traducteur de la Bible, professeur, ambassadeur et poète. Il fut le porte-parole de la Réforme en France au colloque de Poissy, puis pendant les guerres de religion. Il fut le chef incontesté de la cause réformée dans toute l’Europe et le successeur de Jean Calvin à la tête de l’Académie de Genève.

I. La vie de Théodore de Bèze

Son enfance et sa jeunesse

Il naît à Vézelay en 1519 dans une famille bourgeoise.  Élevé dès l’âge de huit ans par un tuteur, Melchior Volmar, luthérien qui lui enseigne le grec, le latin et l’hébreu, il continue sa formation à Bourges où il apprend le droit. Avec Volmar, il devient un lecteur assidu de la Bible, il est marqué par un traité de Heinrich Bullinger (1504-1575), le successeur de Zwingli (1484-1531) à Zurich, qui lui fait connaître la vraie piété, tirée de la Parole de Dieu, sa source la plus pure. En même temps, il mène une vie joyeuse d’étudiant, approfondit sa connaissance des langues, compose des poèmes.

Portrait anonyme de Théodore de Bèze à l’âge de 24 ans, Genève, Musée de la Réforme, XVIe siècle, ©creativecommons

Sa conversion et ses années de formation à Lausanne (1548-1558)

En 1548, à la suite d’une maladie, il se convertit au protestantisme : Alors, Dieu vint me chercher par le moyen d’une grave maladie, qui me saisit au point que je ne pensais pas me remettre… Il se marie, et part à Genève où il découvre Jean Calvin. En 1549, il est requis par Pierre Viret pour occuper une chaire de grec à l’Université de Lausanne. Il y fréquente des théologiens et devient un ardent défenseur de la Réforme. Il entreprend la critique textuelle du Nouveau Testament. Il publie en 1556 La confession de foi du chrétien. Il devient rapidement une personnalité de premier plan dans le monde de la Réforme à côté de Calvin, Farel et Viret. Il reste à Lausanne jusqu’en 1558.

II. Théodore de Bèze à Genève (1558-1605)

En 1558, Bèze donne sa démission comme professeur à l’Académie de Lausanne et rejoint Calvin à Genève. En 1559 est fondée l’Académie de Genève, pépinière d’innombrables pasteurs qui ont apporté à travers toute l’Europe les enseignements de la doctrine réformée et la pratique de la discipline ecclésiastique de l’Eglise de Genève. Bèze en est le premier recteur. Au colloque de Poissy en 1562, réunissant catholiques et protestants, à propos de la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie, Théodore de Bèze refuse de transiger sur le contenu de la communion : Le corps de Jésus-Christ est aussi loin du pain que le haut des cieux est éloigné de la terre. Le colloque échoue. Pendant la première guerre de religion (1562-1563), Bèze devient, à Orléans, secrétaire du prince Louis de Condé, chef des calvinistes.

En 1564 Calvin décède et Bèze lui succède à la tête de l’Église de Genève. Bèze intervient dans les affaires de l’Europe protestante, en particulier dans le Royaume de France ravagé par les guerres de religion. Il s’agit de huit conflits politico-religieux de durée et d’ampleur variables qui ont opposé, en France, catholiques et protestants (réformés) entre 1562 et 1598, depuis le massacre de Wassy jusqu’à l’édit de Nantes. Le paroxysme se déroule en août 1572 lors du massacre de la Saint-Barthélemy. Bèze s’efforce vainement de réunir les Églises issues de la Réforme avec les Églises luthériennes d’Allemagne contre l’ennemi persécuteur commun. Il défend la doctrine réformée et poursuit l’organisation des Églises protestantes en France. Il correspond avec les princes protestants pour obtenir le concours des États allemands dans la lutte contre la Sainte Ligue des Guise, formée en 1576. En 1580, il publie l’Histoire ecclésiastique des Eglises réformées de France. Malade, il renonce à son rôle au sein de la Compagnie des pasteurs. Il passe le reste de ses jours à Genève en se consacrant à la théologie, à la littérature, l’histoire et la poésie, et meurt en 1605, à l’heure du prêche.

III. La prédication de Théodore de Bèze

Au XVIe siècle, les réformateurs – Calvin en particulier – jouent dans leurs prédications de l’identification biblique polémique entre Babylone, la Grande prostituée et Rome, dénonçant les tentatives de séduction catholique pour convertir les protestants. De son côté, le poète Ronsard, catholique et royaliste, compare les Réformés aux sauterelles de l’Apocalypse. Toute une littérature se développe de libelles, plaquettes, pamphlets, satires, mais la prédication, d’inspiration biblique, prend un souffle épique inégalée. C’est surtout à l’Ancien Testament et à l’Apocalypse que les prédicateurs protestants font alors appel.

Théodore de Bèze, peinture anonyme du XVIe siècle, Bibliothèque protestante, Paris

Après l’édit de tolérance de janvier 1562, Bèze prêche publiquement à Paris, près de Saint-Médard ; il doit, à plusieurs reprises s’entourer d’une cohorte armée. Après le massacre des protestants à Wassy en Champagne le 1er mars 1562, les protestants se soulèvent, une armée se forme sous Condé et Coligny. Coligny avait amené à Orléans des milliers de reîtres recrutés en Allemagne et incorporés dans l’armée de Condé. Durant l’automne 1562, Ronsard compose la Continuation du discours des Misères de ce temps. Dans une longue apostrophe, il adjure Théodore de Bèze de renoncer à semer par sa prédication la discorde dans sa patrie :

Ne prêche plus en France une Evangile armée,

Un Christ empistolé tout noirci de fumée,

Portant un morion en tête, et dans la main

Un large coutelas rouge du sang humain :

Cela déplaît à Dieu, cela déplaît au Prince,

Cela n’est qu’un appât qui tire la province

A la sédition, laquelle dessous toi

Pour avoir liberté, ne voudra plus de roi (…)

Un jour en te voyant aller faire ton prêche

Ayant dessous un reître une épée au côté :

Mon Dieu, ce dis-je lors, quelle sainte bonté !

Quel Evangile hélas ? quel charitable zèle !

Qu’un prêcheur porte au flanc une épée cruelle !

De 1564 à 1593, Bèze édite plus de 90 ouvrages et 4 recueils de sermons. C’est pendant la période des sièges successifs de la ville protestante de Genève par les comtes de Savoie, entre 1586 et 1593, que Bèze rédige ses plus beaux sermons :

Sermons sur le Cantique des cantiques (1586)

Sermons sur l’Ecclésiaste (1588)

Sermons sur l’histoire de la Passion et Sépulture de notre Seigneur Jésus Christ décrite par les Quatre Evangélistes (1589)

40 Sermons sur l’histoire de la Résurrection de Notre-Seigneur Jésus-Christ (1593)

Je ne me suis pas attaché à la croix de ton Fils de manière à joyeusement porter la mienne après lui. 28e et dernière prière

En avril 1598 est signé l’Édit de Nantes. Le régime de l’Édit stipule : Nous deffendons à tous prescheurs, lecteurs et autres qui parlent en public d’user d’aucunes parolles, discours et propos tendans à exciter le peuple à sedition, ains leur avons enjoinct et enjoignons de se contenir et comporter modestement, et de ne rien dire qui ne soit à l’instruction et edification des auditeurs, et à maintenir le repos et tranquilité par nous establie en nostre royaume, sur les peines portées par noz preceddens eeditz (…) Article XVII

Martine Petrini-Poli

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