Voir toutes les photos

L’Échelle sainte de Jean Climaque (Jean le Sinaïtique) – Degrés IV à VII

Notre blog Ecrits mystiques continue son exploration du cycle de patristique dédié aux Pères du désert, aux pères cappadociens, aux Pères de l’Eglise latine. Nous poursuivons l’étude de l’Échelle sainte du moine syrien saint Jean Climaque (c. 579-649) avec les degrés IV à VII sur le renoncement à soi et la purification des péchés.
Publié le 12 mai 2022
Écrit par Martine Petrini-Poli
Monastère Sainte Catherine du Sinaï, Égypte, classé au Patrimoine mondial de l’UNESCO © Wikimedia commons

Voici la suite de l’étude de l’Échelle sainte de saint Jean Climaque avec les degrés IV à VII sur le renoncement à soi et la purification des péchés.

Renoncement à soi et purification des péchés (degrés IV à VII)

4. De l’obéissance

Mais je crois qu’il est à propos de considérer ici quelles sont les armes spirituelles dont se servent les généreux soldats de Jésus Christ dont il est question ici, et de connaître de quelle manière ils tiennent le bouclier de la foi et de la confiance en Dieu, pour repousser loin d’eux toute pensée d’infidélité et de désobéissance; comme ils ont toujours l’épée de l’esprit de Dieu hors du fourreau pour immoler tous les mouvements de leur propre volonté, comme ils sont entièrement couverts des cuirasses de la patience et de la douceur pour émousser toutes les pointes dangereuses des injures, des moqueries et des paroles outrageantes, et comme ils portent sur la tête le casque du salut, qui consiste dans les prières ferventes de leur supérieur, qui les défend des traits enflammés de leurs ennemis. Voyez comme ils sont fermes et inébranlables dans leurs positions, et comme néanmoins ils jouissent de la délicieuse liberté des enfants de Dieu ; car tandis qu’ils sont immobiles dans leurs prières continuelles, ils ne laissent pas d’exercer les devoirs de la charité en faveur de leurs frères en Dieu (§2).

Les Pères enseignent que la psalmodie est une arme, la prière un rempart et les larmes immaculées un bain ; mais la bienheureuse obéissance, ils l’ont assimilée à la confession de la foi (§9).

La métaphore militaire se poursuit dans ce 4e degré de l’Échelle du Paradis.

5. De la pénitence

Rien n’égale ni ne surpasse les miséricordes de Dieu. C’est pourquoi celui qui désespère est son propre meurtrier.

La pénitence est le rétablissement du baptême. C’est une espèce de contrat par lequel nous promettons à Dieu de nous corriger des défauts de notre vie passée, et de mieux vivre dans l’avenir. La pénitence, si j’ose me servir de cette expression, est chargée des intérêts de l’humilité ; c’est un renoncement parfait à tous les plaisirs des sens ; c’est un jugement sévère qu’on porte contre soi-même ; c’est l’occupation sérieuse d’une âme qui s’applique tout de bon à l’affaire de son salut éternel. Elle est la fille aînée de l’espérance et l’ennemie mortelle du désespoir (§2).

6. De la pensée de la mort

Il est impossible de passer pieusement le jour présent si nous ne le considérons pas comme le dernier de notre vie.

Le Christ, pour nous apprendre qu’il est Dieu et homme tout ensemble, et pour nous enseigner que les attributs de la nature divine et de la nature humaine sont son partage, s’est effrayé à la vue de la mort ; mais ce divin Sauveur ne l’a pas redoutée (§4).

7. De l’affliction

La componction que les moines appellent componction religieuse, est un remords de la conscience par lequel celle-ci force une âme à s’accuser intérieurement coupable et criminelle, et par cette confession intérieure l’embrase d’un feu tout divin, et lui procure un merveilleux rafraîchissement (§3).

N’oublions pas ici que Dieu n’a pas besoin de nos larmes, et qu’Il n’aime pas à voir que les inquiétudes et la tristesse dévorent et consument nos cœurs ; mais qu’Il désire qu’embrasés du feu sacré de son Amour, nous goûtions et savourions les délices d’une joie toute pure et toute spirituelle (§49).

« L’Échelle serait construite, sans rigueur excessive, dans un système d’opposition parallèle, assez familier à la pensée antique, qui reprend un point de doctrine semblable à deux niveaux différents. On voit ainsi le détachement (II) annoncer l’impassibilité (XXIX), l’obéissance (IV) annoncer le discernement (XXVI), la pénitence (V) annoncer l’humilité (XXV), l’acédie (XIII) annoncer l’insensibilité (XVII). C’est dans ce jeu d’oppositions que l’on perçoit ce que Jean Climaque entend par progrès spirituel : l’effort, le ϰόπος qui a la première place dans le premier volet, devient insensiblement charisme dans le second. On ne peut pas dire que ce procédé d’exposition, qui échappe à la conscience claire du lecteur, soit limpide. Il est délibérément obscur et déroutant. L’auteur est trop conscient du caractère mystérieux de la montée vers Dieu pour accepter d’en donner un programme si accessible au premier venu qu’il puisse garder l’illusion d’avoir saisi l’insaisissable. Il doit, en quelque sorte, « brouiller les cartes » pour réserver l’intelligence à celui à qui l’expérience a déjà donné quelque lumière et respecter la diversité des cheminements. Il tient aussi à tenir compte des limites de sa propre connaissance, la « science simple » (γνῶσις ψιλή, XXVII, 1105b), sachant bien que la réalité est irréductible à l’image qu’il essaye d’en donner. » Guerric Couilleau, ‘Jean Climaque (saint)in Dictionnaire de Spiritualité 8 (1974).

Martine Petrini-Poli

Edward Burne-Jones, The Golden Stairs (L’Escalier d’or), 1880, Tate Gallery, Londres, inspiré du Chant XXI du Paradis de Dante © Wikimedia commons

Contenus associés
Commentaires
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *