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« Regardez les oiseaux du ciel » – ‘Les Intimes’ de Cendrine Genin

Révélateur de l'imperceptible, de l'invisible, le regard photographique peut amener à une relecture du réel qui fait apparaître la profonde fragilité des choses, et l'intense présence de notre monde aussi éphémère que précaire. Ce paradoxe entre profondément en dialogue avec le cheminement de l'Avent. Dans ce billet de blog, Françoise Paviot nous livre ses impressions face à la série de photographies de Cendrine Genin, Les Intimes, habitée par une mystérieuse présence, au-delà de l'absence.
Publié le 17 décembre 2022
Écrit par Françoise Paviot Co-directrice de la galerie Françoise Paviot
Cendrine Genin, Les Intimes, 2019, tirage argentique sur papier Hahnnemühle, 30 x 40 cm (édition de 3) © Cendrine Genin courtesy Galerie l’Antichambre
« Regardez les oiseaux du ciel  » Matthieu, 6-26

Le regard photographique peut-être triomphant, affirmer la puissance de la nature, l’immensité d’un paysage, l’imposante présence d’un grand homme ou l’exploit spectaculaire d’un sportif. C’était, et c’est encore, une de ses missions premières. Mais ce même regard sait aussi dépouiller l’image de son devoir de ressemblance pour l’ouvrir à d’autres aspects du monde et accéder ainsi à la reconnaissance de chacun d’entre nous. Car la photographie sait aussi se faire précaire.

Les Intimes *, c’est le titre donné par Cendrine Genin à une série d’images qu’elle a ébauchée chez sa mère. Une intrusion dans les gestes et les détails de chaque jour qu’elle qualifie comme « autant de variations intimes…ou de failles infimes…fils entre le visible et l’invisible qui marque notre finitude ». La technique et le savoir-faire de la photographe sont bien là mais se font oublier pour ouvrir un temps de méditation, et donner ainsi à l’image la possibilité de prendre sens. Ces petits objets du quotidien, à la portée de tous et souvent laissés pour compte rappellent, dans la fragilité et l’indécision de leur matière photographique, des impressions parfois fugitives qui ont droit aussi à l’essentiel.

Cendrine Genin, Les Intimes, 2019, tirage argentique sur papier Hahnnemühle, 30 x 40 cm (édition de 3) © Cendrine Genin courtesy Galerie l’Antichambre

Il reste cependant, solitaire, un clou planté dans le mur au papier peint usé par  le temps, comme pour dire ce qui n’est plus. On a peut-être chassé l’étranger du logis, un loyer a été impayé, la maladie a fait son œuvre. Est-ce pour nous rappeler, le clou futur de la croix, la solitude de celui qui malgré tout scellera une nouvelle alliance. Cependant, un simple moineau, mystérieusement perché sur le bord d’une cheminée, nous invite, avant de prendre son envol, à guetter tout autour de nous le jour qui va bientôt se lever.

Françoise Paviot

* Les Intimes, série réalisée en 2019 – Tirages sur papier argentique

Cendrine Genin, Les Intimes, 2019, tirage argentique sur papier Hahnnemühle, 30 x 40 cm (édition de 3) © Cendrine Genin courtesy Galerie l’Antichambre

Gestes
gestes de la vie ignorée
de la vie
de la vie impulsive
et heureuse à se dilapider
de la vie saccadée…
de la vie n’importe comment…
Gestes du dépassement
surtout du dépassement

Henri Michaux

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