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La Passion du Christ en images : les représentations du Chemin de croix, une histoire aux sources multiples

L’origine du chemin de croix se confond avec le pèlerinage des premiers chrétiens à Jérusalem. Le plus ancien témoignage connu est celui d’Ethérie (1), une noble gauloise d’Espagne qui, au IVe siècle, visita les lieux saints et participa aux liturgies locales. Quatre périodes ont marqué l’évolution de cette dévotion.
Publié le 15 avril 2019

A partir du XIIe siècle, se développent des éléments de la dévotion à la Passion comme la dévotion à la Pietà, aux plaies du Sauveur, à la Sainte Face. L’arrivée, en Terre Sainte, des Franciscains, auxquels la garde des lieux saints est confiée au début du XIVe siècle, structure les pèlerinages organisés sur les lieux de la Passion. Il ne s’agit pas encore de « chemin de croix » mais de visite des lieux mentionnés dans les Evangiles ou dans les livres relatant la vie du Christ. Le pèlerinage en Terre sainte est, au Moyen-Âge un acte essentiel de la vie religieuse. Mais, au XVIe siècle, le voyage devenant plus onéreux et plus incertain avec l’affirmation de la puissance ottomane dans cette région, des pratiques de substitution se développent.

Au XVe siècle, le début de l’iconographie du chemin de croix

Dès le XVe siècle se dessine un tournant avec le développement de la dévotion aux « chutes de la Passion » ou encore, en Allemagne et aux Pays-Bas, aux « chutes sous la croix ». Par ailleurs, en Allemagne et à Rome, on vénère les « marches du Christ » parfois en suivant un chemin balisé de colonnes dressées et conduisant vers une église.

Les stations du Christ, une dévotion aux « chutes de la Passion »

Des calvaires fleurissent en Europe, parcours dévotionnels qui constituent la forme primitive du chemin de croix. S’il y a chute, il y a arrêt et à la même époque apparait la dévotion aux « stations du Christ » dont le nombre varie de six à dix-huit dans certains cas. La diversité prévaut aussi quant au cheminement proposé qui peut débuter par l’adieu de Jésus à sa mère ou au Jardin des Oliviers ou encore lors de la parution de Jésus devant Pilate. L’iconographie du chemin de croix commence à se constituer à cette période. Adam Kraft érige entre 1477 et 1508, à Nuremberg, sur la demande d’un bourgeois de la ville de retour de Jérusalem, sept stations se terminant par une Vierge de pitié. Dans sa Pérégrination spirituelle, le carme flamand, Jan Pascha (2) mentionne quatorze stations.

 

EGLISE SAINT-JEAN-BAPTISTE-DE-BELLEVILLE, PARIS, STATION IV, JÉSUS RENCONTRE SA MÈRE, DEMI-RELIEF EN MÉTAL REPEINT EN BRONZINE ARGENTÉ. PHOTOGRAPHIE B. LODIER
Au XVIe siècle, le marchand drapier Romanet Boffin, installé à Romans -sur-Isère, découvre le calvaire à sept piliers de Fribourg et décide d’en ériger un similaire dans sa ville. Au XVIIe siècle, en France, l’un des hauts lieux de la dévotion au chemin de croix, est le Mont-Valérien avec ses chapelles marquant 11 stations.

Un cheminement qui varie de six à dix-huit stations, pour se fixer à quatorze en 1731

Tandis que subsistent des chemins de croix à douze stations, celui à quatorze stations s’impose peu à peu, au XVIIIe siècle. L’ouvrage du savant hollandais Andrichomius (3), diffusé jusqu’en Terre sainte, a largement contribué à l’harmonisation du nombre des stations. Avec l’appui de Clément XII qui, en 1731, fixe le nombre de stations à quatorze, cette formule du chemin de croix va se répandre dans les églises paroissiales, et les couvents franciscains l’adoptent. L’un de ses grands promoteurs est saint Léonard de-Port-Maurice, mort en 1751, qui en établit un sur chaque lieu où il prêche une mission, le plus célèbre étant le chemin de croix du Colisée, béni en 1750.

 

VIIIE STATION DU CALVAIRE DU MONT VALÉRIEN, JÉSUS ÉLEVÉ SUR LA CROIX, GRAVURE

Une pratique qui se répand en France au XIXe siècle

Au XIXe siècle, la pratique se répand sous la Restauration, quand les missionnaires investissent le champ de la pastorale auprès d’une population souvent déchristianisée après la Révolution. C’est à cette époque que le chemin débutant par le procès et se terminant par la mise au tombeau, est introduit en France, par l’intermédiaire des prêtres, immigrés en Italie au moment de la Révolution française, et de retour en France.
Les représentations figurées des chemins de croix sont donc les résultantes, d’une part, des pèlerinages en Terre Sainte et, d’autre part, de l’imitation populaire de ces pèlerinages mais aussi des harmonisations conduites par des érudits. Les Mystères joués dans le chœur des églises comme le Mysterium resurrectionnis D.N. Jesu Christi, ont également contribué à familiariser le peuple et les artistes à ces images qui instruisaient par les yeux les spectateurs du Moyen-Âge sur les souffrances et la mort de Jésus-Christ.
Ainsi, l’évolution des représentations des scènes de la Passion du Christ ont suivi celle des sensibilités chrétiennes et le chemin de croix se présente aujourd’hui comme une présentation structurée autour de deux pôles : la méditation sur la Passion et la marche sur les pas du Jésus qu’accompagnent un support visuel directement accessible qui joue sur le sensible et ancre dans la mémoire et la conscience du fidèle la foi et l’amour du Christ.


Josette Saint-Martin

Sources bibliographiques

1-Hervé Savon, « Égérie, Journal de voyage (Itinéraire) », Introduction, texte critique, traduction, notes, index et cartes par Maraval (Pierre) in : Revue belge de philologie et d’histoire, tome 65, fasc. 1, 1987.
2- Jan Pascha, Pérégrination spirituelle, Louvain, Vincent et Abel, 1563, p.630.
3- Adrichem (van) Christiaan ou Andrichomius, Theatrum Terrae Sanctae et biblicarum historiarum cum tabulis geographicis aere expressis, Cologne, In Officina Birckmannica, 1613.

 

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