La cantate « Liebe, die vom Himmel stammet » (« Amour qui vient du ciel ») de Georg-Philipp TELEMANN (1681-1767) était destinée à un dimanche après l’Épiphanie de 1726. Telemann était depuis 1721 installé à Hambourg comme Directeur de la Musique d’Eglise pour l’ensemble de la ville. Il était devenu l’un des musiciens sinon le musicien le plus célèbre d’Allemagne, bien plus connu que son contemporain Jean-Sébastien Bach.
Les quelques 1400 cantates qu’il nous a laissées se divisent en deux grandes formes : les œuvres pour une voix, un instrument et continuo appelées Cantates, et les œuvres pour solistes, chœur et orchestre appelées Musiques.
La cantate que voici est destinée à une voix d’alto, un violon et le continuo assuré ici par une viole de gambe, un basson et un clavecin. Le texte, écrit par un juriste amateur de littérature, Matthaeus-Arnold Wilkens (1704-1759) est une sorte de paraphrase de l’épître aux Colossiens (ch. 3) :
Puisque vous êtes aimés par Dieu, revêtez-vous de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience […] Tout ce que vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit toujours au nom du Seigneur.
© Wilson L. Mead Fund
La cantate 1044 de Telemann se divise en trois parties : deux airs encadrant un récitatif. Cette musique est typique de l’esthétique baroque faite de légèreté, de simplicité, de transparence voire d’une certaine galanterie. Mais cela ne doit pas en masquer la profondeur. Cette musique est comme nourrie à la fois de la science rhétorique et de la transparence de la danse. Elle respecte les trois grandes parties du discours rhétorique : exordium-confutatio-peroratio.
1° air
Amour qui vient du ciel remonte au ciel.
Les œuvres montrent si nous sommes dans l’amour qui peut exister devant Dieu.
Dès les premières mesures du violon, la musique nous entraîne dans un jeu vigoureux entre le grave (image de notre condition terrestre) et l’aigu (image du divin). Les mouvements descendants semblent toutefois l’emporter, cédant à la pesanteur humaine.
Suivant les conventions de l’époque, il s’agit d’un air en trois parties ponctuées chacune par une cadence suivie d’un silence. La troisième partie reprend la première suivant les lois de la composition baroque.
2° récitatif
L’amour qui ne se manifeste pas dans les œuvres n’est pas miséricordieux, ne pardonne pas, est seulement terrestre, vide, mort.
On imagine le ton dramatique d’un tel texte, aux accents vigoureux. Une deuxième partie vient équilibrer ce premier volet :
Laissez-vous habiter par la paix qui vient de Dieu.
Laissez la parole du Christ vous conduire. Chantez Alléluia, Louange, Amen !
Quoi que vous fassiez, faites-le au nom de Jésus.
3° air
Un déferlement de joie, de rythmes, de rebonds, conclue cette cantate sur un air lui aussi en trois parties avec reprise : la joie véritable, celle qui nous vient de Dieu, doit nous habiter malgré les vicissitudes du temps. Sans doute avons-nous besoin d’entendre aujourd’hui ce message de louange confiante.
Seigneur des puissances célestes, le monde entier te rend grâce pour ton amour.