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La création à Notre-Dame : les « Vêpres de la Vierge Marie » de Philippe Hersant

L’Eglise a toujours été une source importante et riche de création artistique, pas seulement dans le domaine de la peinture ou de l’architecture mais aussi dans celui de la musique. Voici un exemple récent d’une commande à un artiste, Philippe Hersant, avec « Les Vêpres de la Vierge Marie », oeuvre spécialement destinée à la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Publié le 24 juin 2019
Écrit par Emmanuel Bellanger

La Vierge du Pilier à Notre-Dame de Paris, 2018 © Marie-Christine Bertin

Le Jubilé des 850 ans de la cathédrale Notre-Dame de Paris a été célébré en 2013 : il en reste le superbe signal sonore des nouvelles cloches dans la tour nord dont nous retrouverons la voix dans quelques années.

A cette occasion, la cathédrale a commandé en 2010 au compositeur Philippe Hersant une œuvre nouvelle intitulée les « Vêpres de la Vierge Marie » qui ont été créées en ce lieu le 10 décembre 2013. L’archevêché de Paris avait fixé avec précision ses attentes : il s’agissait d’un office de Vêpres selon son déroulement liturgique habituel avec sa succession d’hymnes et de psaumes. L’œuvre est écrite pour chœur, deux solistes (ténor et baryton), deux orgues et quelques cuivres.

Ce mystère de l’Incarnation, Philippe Hersant l’incarne à son tour avec des sons lancés dans l’espace, celui de cette cathédrale.

Nous écoutons les derniers moments de cette œuvre grandiose : le Magnificat. Nous imaginons généralement sur ce texte une musique solennelle, contrastée mais de tonalité globalement joyeuse, assez extériorisée. Le compositeur nous donne ici une autre traduction de l’évènement auquel renvoie le Magnificat : la Vierge Marie chante son émerveillement devant le mystère de ce que lui a annoncé l’Ange envoyé par Dieu. Un enfant naîtra de son sein qui va changer la face du monde. Ce mystère de l’Incarnation, Philippe Hersant l’incarne à son tour avec des sons lancés dans l’espace, celui de cette cathédrale.

LA VIERGE DU PILIER (détail), NOTRE-DAME DE PARIS © MARIE-CHRISTINE BERTIN

La musique semble briser les limites du temps avec un art maîtrisé de la consonance et de la dissonance

Le fini de notre monde rencontre l’infini de Dieu, le temps de la musique rencontre l’éternité. Nous découvrons que le son en musique est bien plus que des notes, des timbres et des durées, il est aussi espace, densité, grain, ouverture à partir de l’entendu vers l’inaudible ou plutôt l’au-delà de l’audible.

Comme l’espace limité de la cathédrale ouvre sur l’espace infini, au-delà des vitraux du chœur et de la croix d’or qui ne le ferme pas mais invite à le dépasser, la musique semble briser les limites du temps avec des moyens finalement assez simples, mais mis en œuvre avec un art maîtrisé de la consonance et de la dissonance, de la progression des timbres qui s’enrichissent au fur et à mesure.

La musique s’étire en longues, très longues tenues ; elle se déroule en un lent crescendo qui monte lentement vers l’aigu, appuyée solidement sur des basses profondes. Confronté à l’éternité, le temps s’immobilise jusqu’à l’Amen final, infiniment répété sur le même accord, résonant sous les voûtes de Notre-Dame dont les évènements récents nous ont rappelé qu’elle n’est qu’une image fragile de cette éternité à laquelle la musique, de manière paradoxale, nous ouvre.

Emmanuel Bellanger

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