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II / IV – Le Sacré-Coeur d’Audincourt, un lieu de nourriture spirituelle

Voici la seconde publication de la 'saga' en quatre volets sur un édifice d'une modernité étonnante, l'église du Sacré-Cœur à Audincourt dans le Doubs, fondée le 16/09/1951, qui célèbre cette année le jubilé de ses soixante-dix ans. Grâce à l'énergie d'un curé bâtisseur, le Père Louis Prenel, accompagné du Père Marie-Alain Couturier au regard visionnaire et exigeant, et d'artistes de premier plan, tels Fernand Léger et Jean Bazaine, le projet a pris forme et donné lieu à un église innovante et chargée de sens, classée Monument historique, à découvrir !
Publié le 11 février 2010

Il y a 70 ans, la France vit dans la fièvre de la reconstruction, et c’est dans ce contexte que quelques précurseurs, tels que le Père Couturier reconnu par les artistes, aident l’Église catholique à évoluer vers une spiritualité plus ouverte au monde contemporain. Une spiritualité qui se répercute sur les formes et l’aménagement des églises, entraînant l’art du vitrail dans des recherches novatrices.

Cette évolution artistique et spirituelle donne naissance aux églises du Plateau d’Assy, d’Audincourt, ou aux chapelles de Ronchamp et de Vence. Architectes et artistes sont alors invités à créer une atmosphère spirituelle, esthétique et colorée, dans l’esprit fraternel des fondements du christianisme.

VUE DE LA NEF DE L’ÉGLISE DU SACRÉ-COEUR À AUDINCOURT © PAYS DE MONTBÉLIARD TOURISME

L’église du Sacré-Coeur d’Audincourt est née de l’engagement collectif d’une jeune paroisse ouvrière, dont le dynamisme a rencontré et stimulé le sens créatif d’artistes engagés. Ainsi, au Sacré-Coeur, la complémentarité des volumes de Maurice Novarina, des œuvres de Jean Bazaine, de Fernand Léger et Jean Le Moal suscite l’émerveillement du regard et de l’âme. Elle réussit à exprimer l’indicible et à proposer un chemin spirituel pour élargir nos horizons.

Paul Klee nous le rappelle :« L’art ne reproduit pas le visible, il rend visible. »

Et Jacques Maritain ajoute que si l’artiste « ne s’emplit pas de l’univers, il reste vide à lui-même.(…) Il ne peut s’exprimer dans une œuvre qu’à condition que les choses résonnent en lui. » (cf. Revue des Deux Mondes : article de Michel Riquet S.J. « Jacques Maritain, philosophe de l’art » p. 293)

JEAN BAZAINE, MOSAÏQUE SUR LA FAÇADE DU SACRÉ-COEUR D’AUDINCOURT

Avec Jean Bazaine, les eaux vives d’un fleuve, ou la beauté d’un lever de soleil observé depuis une plage, sont devenues les matières premières (les sources d’inspiration) de cette monumentale et magnifique mosaïque de la façade du Sacré-Coeur, et par la suite des vitraux du baptistère inondé de lumière. Sa volonté de traduire les merveilles de la nature est une invitation à éveiller le coeur des hommes, à ouvrir leur regard, et leur proposer de pénétrer dans ce lieu coloré, calme et lumineux qui parle de mort et de vie, de libération, d’espérance et de paix.

Paul Baudiquey qui a fréquenté et médité dans cette église relève :
La grande tradition spirituelle ne cessera d’abreuver sa soif de vision à cette source : « Les cinq plaies du Christ, comme cinq soleils » blasonnent à jamais le Corps du Ressuscité. Explosion lyrique de la fresque de Bazaine au Sacré-Coeur d’Audincourt ! Et c’est la même transfiguration qui marque déjà, de son invisible empreinte, le corps et le Visage de cet autre Christ, toujours en agonie, qu’est notre humanité en travail d’enfantement. (ref. l’ouvrage : Visage, Paroles pour la dignité de l’homme, Ed. Salvator, 1988 p. 58)

LES VITRAUX DE JEAN LE MOAL DANS LA CRYPTE DU SACRÉ-COEUR D’AUDINCOURT © F. NAGELEISEN

Sollicité pour réaliser les vitraux de la crypte, lieu propice au recueillement, Jean Le Moal explique par ailleurs : « Le sens du sacré qui m’a amené à faire des vitraux, c’est le fait que l’on est sensible à un certain climat : le sacré, on le rencontre à Delphes comme dans les églises romanes. Quand j’étais à Cuzco, je l’ai éprouvé aussi, et en Bretagne, en entrant dans un tumulus comme celui de Gavrinis ». ( Paroles d’artistes, ouvrage de Jean Le Moal, Ed. Fage, p.46)

FERNAND LÉGER, VITRAIL, SACRÉ-COEUR D’AUDINCOURT © F. NAGELEISEN

Au sujet d’Audincourt, Fernand Léger raconte : « Je désirais apporter un rythme évolutif de formes et de couleurs pour tous, croyants et incroyants, quelque chose d’utile, accepté aussi bien par les uns que par les autres, du seul fait que la joie et la lumière se déversent dans le coeur de chacun. »
(Yves Bouvier et Christophe Cousin, Audincourt, Le sacre de la couleur, 2007, Neo Editions, p. 65)

Imprégnés par l’histoire, l’énergie, l’expérience de leur époque, les artistes créent une œuvre pour leurs contemporains. Lorsque la réalisation d’un Fernand Léger ou d’un Jean Bazaine devient un chef-d’oeuvre, alors elle ne cesse plus d’inspirer, de donner du sens et d’ouvrir un dialogue avec les générations suivantes.

LES VITRAUX DE JEAN BAZAINE EN COLLABORATION AVEC LE MAÏTRE-VERRIER JEAN BARILLET DANS LE BAPTISTÈRE, SACRÉ-COEUR D’AUDINCOURT © F. NAGELEISEN

Les paroissiens-bâtisseurs de l’église ont été également constructeurs solidaires des « castors », ces nouveaux quartiers d’Audincourt, en réponse à la pénurie de logements. Mais cette démarche volontaire, généreuse, de la génération des bâtisseurs s’est peu à peu diluée et assoupie au fil des générations. Depuis, la paroisse a fusionné avec sa sœur aînée de l’autre secteur de la ville.

Plus largement, pour tout un diocèse aujourd’hui, se pose la question cruciale : quelles églises pour quelle Eglise, quels lieux de culte pour quelles communautés ? Nos sociétés vivent actuellement de grandes tensions: les modèles économiques sont en crise, le climat se modifie, les populations vivent dans l’incertitude et s’interrogent.

La réintroduction de la spiritualité dans l’éducation et dans l’apprentissage de la vie en société, dans la réflexion économique, dans le monde du travailouvre des champs d’investigations pour l’Église. La recherche spirituelle nous relie à la communauté humaine, elle nous libère et nous universalise. Elle nous rend responsables de la vie du monde et des hommes, ici et maintenant.

VUE de la demi-COUPOLE au dessus du CHoeur DE L’ÉGLISE DU SACRÉ-COEUR À AUDINCOURT AVEC LES VITRAUX DE FERNAND LÉGER © F. NAGELEISEN

L’église du Sacré-Coeur, construite en 1950 dans l’enthousiasme, devenue Monument d’art sacré du XXème siècle, est toujours en 2021 un lieu de beauté, porteur de paix et de sens.

Evoquons à nouveau l’ami Paul Baudiquey, méditant l’oeuvre du peintre Georges Rouault :
« Car désormais tout est accompli. La lumière prend possession du monde, de ce monde de lie et de sang; les fulgurances inscrivent leurs éclairs dans la trace profonde des blessures. Une clarté de moisson impose l’or de son jaune, la tendresse de ses verts, la profondeur sans fond de son bleu. Cette épaisseur de la matière, ce poids des couleurs évoquent la terre transfigurée dont notre chair est issue. » (ref : Visage, Ed. Salvator 1988, p60)

Au moment du 70e anniversaire du Sacré-Coeur d’Audincourt, rappelons la parole du Père Couturier, l’artisan spirituel de l’église: « S’il est une chose qu’Audincourt doive nous enseigner, c’est l’espérance » (L’art Sacré – Audincourt, 1951, p.2)

François Nageleisen

Pour en savoir plus

Commandez vite l’ouvrage sur le Sacré-Coeur d’Audincourt qui vient d’être publié, à l’initiative de la Commission de sauvegarde du Sacré-Cœur, avec le soutien du diocèse de Belfort-Montbéliard :

Père Axel Isabey, Jean-Michel Magnin, François Nageleisen, « L’église du Sacré-Cœur à Audincourt – un lieu de ressourcement spirituel pour aujourd’hui », édition Diocèse de Belfort-Montbéliard, 120 p., 16€

Pour les commandes, le prix est de 16€ + 4€ de frais d’envoi (France), soit un total de 20€. (l’affranchissement jusqu’à 250 gr est de 3,94€ à ce jour).

Chèques à l’ordre de l’ « Association diocésaine Belfort/Montbéliard ».

Commandes à adresser à Edwige DUMEL ou à François et Marie-Christine NAGELEISEN :
1) François et Marie-Christine NAGELEISEN, 10 rue Charles Peugeot 25400 AUDINCOURT 03 81 34 55 21 –  f.nageleisen@wanadoo.fr

2) Edwige DUMEL, 27 rue du Serrurier 25230 VANDONCOURT
06 71 27 09 00 – edwige.dumel@wanadoo.fr

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