L’extraordinaire postérité de Saint-Martin célébrée à Tours

L’année 2016 célèbre le 1700e anniversaire de la naissance de Martin de Tours (316-397), premier saint non martyr de l’Eglise latine. A cette occasion, le musée des Beaux-Arts de Tours consacre une grande exposition à celui qui fut nommé évêque de la ville en 371. Le parcours rassemble manuscrits, peintures, objets d’art, reliquaires, vitraux, tapisseries, dessins, estampes, sculptures, mobilier archéologiques, du IVe siècle au XXe siècle, dont de nombreux chefs-d’œuvre provenant de prestigieuses collections nationales et internationales. 120 œuvres qui racontent l’histoire du saint missionnaire fondateur de nouvelles communautés chrétiennes, de son culte répandu dans toute l’Europe occidentale et de son influence dans l’iconographie à travers les siècles.
Publié le 07 novembre 2016

Anonyme, Heures à l’usage de Rome : Saint Martin partageant son manteau, Vers 1510, Enluminure – Tours, bibliothèque municipale © Tours, Bibliothèque municipale

La Vita Martini (Vie de Saint Martin), écrit par Sulpice Sévère, disciple de Martin, et qui introduit l’exposition, pourrait être le fil conducteur du parcours qui attend le visiteur. Le récit datant de 396-397 relate les grands épisodes de la vie du saint ; son choix de se faire soldat du Christ, son élection épiscopale à Tours, les miracles effectués ou encore la fondation du monastère de Marmoutier . L’épisode resté le plus célèbre, omniprésente dans l’iconographie consacrée à saint Martin et particulièrement représentée dans la première section de l’exposition, est celui de La Charité d’Amiens.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jan Polack, Saint Martin et le mendiant, 1500, Tempera sur bois. H. 125 ; l. 56,3 cm – Maastricht, Bonnefantenmuseum ©Peter Cox / Bonnefantenmuseum, long-term loan Cultural Heritage Agency of the Netherlands
Johann Kachler (?), Saint Martin partageant son manteau, 1628, Verre et plomb. H. 35,6 ; l. 22,8 cm – Paris, musée du Louvre, Département des Objets d’art © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Daniel Arnaudet

Anonyme, Charité de saint Martin, Fin du XVe siècle , H.74 ; l. 79 cm, Calcaire sculpté Paris, Musée du Louvre, dépôt au musée des Beaux-Arts de Tours © Musée des Beaux-Arts – Tours

Alors qu’il doit célébrer le culte à Amiens, Martin n’accepte pas de commencer tant qu’un pauvre qui avait demandé des vêtements n’a pas reçu le nécessaire. Le diacre tardant à satisfaire sa demande, Martin retire sa propre tunique pour la donner au pauvre. Un évènement miraculeux se produit tandis qu’il célèbre la messe : un globe de feu apparaît au-dessus de sa tête. La Charité d’Amiens devient une image absolue de la sainteté : elle constitue une scène théologale* complète par la foi du saint, l’espérance du pauvre et la charité du manteau partagé. Cette histoire devient alors universelle, donne un modèle de sainteté aussi bien aux chrétiens qu’aux païens et est capable de persuader les incrédules.

Pietro di Cristoforo Vannucci, dit Pérugin, Saint Martin, Début XVIe siècle, Huile sur bois. D. 102 cm – Paris, musée du Louvre, Département des peintures © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Daniel Arnaudet

Ainsi, la Vita Martini est à l’origine d’un immense travail de réécriture entrepris à travers les siècles par des écrivains soucieux d’édifier leurs lecteurs par l’exposé d’une vie exemplaire. Chaque auteur peut transmettre à la postérité un monument du passé tout en adaptant le récit aux préoccupations et aux goûts de ses contemporains. En témoigne un magnifique recueil de textes sur saint Martin datant de 1325-1328 :

Anonyme, Translatione capitis s. Martini (De) : Translation du chef de saint Martin et la famille royale en prière, Vers 1340-1350, Enluminure – Tours, bibliothèque municipale © Tours, Bibliothèque municipale

Martin, grand voyageur évangélisateur, parcourut une bonne partie de l’Empire romain dans sa partie occidentale, de sa Pannonie natale (actuelle Hongrie), à l’Italie et à la Gaule. L’exposition privilégie les lieux qu’il a habités voire fondés, et ceux édifiés après sa mort en Touraine et en Poitou. A travers des pièces archéologiques du IVe siècle au XIV siècle, – chapiteaux, reliefs sculptés, fragments du tombeau de Martin -, nous suivons donc l’itinéraire de Martin. L’accent est mis sur les lieux emblématiques des deux grandes communautés fondées par Martin de part et d’autre de la Loire : l’Abbaye de Marmoutier, et la collégiale Saint-Martin de Tours.

Louis Boudan, Vue de Marmousiter lez Tours

La majorité des sites martiniens ont fait l’objet de travaux et recherche récents, dont certains se poursuivent : les fouilles archéologiques et analyses architecturales vont de pair avec la relecture des sources écrites médiévales et modernes et l’analyse des documents iconographiques nombreux à partir du XVIIe siècle. C’est donc un état de l’art ancré sur une réflexion renouvelée qui est présentée dans cette seconde de l’exposition.  Un film en 3D permettant de découvrir une reconstitution de l’ancienne basilique Saint-Martin est d’ailleurs présenté au public.

La redécouverte, à Tours, du tombeau de Saint-Martin en 1860 déclenche la reconstruction de la basilique, menée par l’architecte Victor Laloux de 1886 à 1902. L’architecte apporte un soin particulier à la décoration de l’édifice au plan inspiré des basiliques paléochrétiennes et bâti sur le tombeau du saint.  Soucieux de cohérence et désireux de créer une atmosphère parfaitement évocatrice du style romano-byzantin, il met en œuvre une ornementation complexe qui ne néglige aucun détail En attestent les esquisses, dessins et cartons préparatoires aux vitraux présent dans l’exposition. Parallèlement au projet de construction de la basilique de Tours, l’imagerie martinienne connait un véritable engouement.

Elle se répand d’une manière spectaculaire sur l’ensemble du territoire national : l’iconographie est largement dominée par le thème de la charité. Celle-ci véhicule en effet, plus largement, l’exercice de la bienfaisance qui devient une préoccupation sociale tout au long du XIXe siècle.


*La Foi, l’espérance et la Charité sont, selon la théologie chrétienne, les trois vertus qui doivent guider les hommes dans leur rapport au monde et à Dieu

 

Découvrez ici le film 3D de la Renaissance en musique de l’ancienne collégiale Saint-Martin de Tours


Informations pratiques
 

Exposition « Martin de Tours, le rayonnement de la Cité »
Du 8 octobre 2016 au 8 janvier 2017 au Musée des Beaux-Arts de Tours
18, place François-Sicard, 37000 Tours.
Téléphone : 02 47 05 68 73
Horaires : tous les jours de 9h à 12h45 et de 14h à 18h
Fermé le mardi, le 1er janvier, le 1er mai, le 14 juillet, le 1er et 11 novembre et le 25 décembre
www.mba.tours.fr

Découvrez ici toutes les activités autour de l’exposition 

Ci-dessus: Auguste-Felix BAUER, La leçon d’enluminure (détail), 1891, Huile sur toile – Beauvais, Musée départemental de l’Oise – © RMN-Grand Palais / Thierry Ollivier
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