Entrer en contact avec un ordre situé au-delà des apparences physiques, dépasser les réalités matérielles pour approcher les mystères de l’existence, expérimenter l’oubli de soi-même dans l’unité parfaite avec le cosmos : toutes ces quêtes caractérisent le mysticisme, phénomène spirituel présent en parallèle de toutes les religions, sur tous les continents. Pourquoi ne pas en reconnaître la présence dans la peinture de paysage au tournant du XXe siècle, qui cherche à exprimer l’interrogation de l’homme face à la nature ?
La scénographie intimiste encourage le visiteur à une approche sensible, spirituelle des œuvres. La contemplation de la nature par les artistes, illustrée par les célèbres séries de Monet (La cathédrale de Rouen, Les Meules) ou par les recherches de Klimt, Kandinsky… ouvre l’exposition et invite aussi à la contemplation du visiteur, par un jeu de miroir. Par ces œuvres, le spectateur est amené à explorer un sentiment de transcendance, alors que l’objet tend à s’effacer au profit des couleurs. Les variations de la lumière du jour sur un même sujet sont une métaphore de la vie et du temps qui passe.
L’exposition donne l’occasion de voir ou de revoir des grands noms de la peinture européenne du tournant du XIXe et du XXe siècles : Vincent Van Gogh, Paul Gauguin, Maurice Denis, Edvard Munch… mais offre aussi la possibilité de découvrir des artistes moins connus et moins exposés dans nos musées, grâce à une section consacrée aux peintres canadiens. Inspirés dans un premier temps par les travaux des peintres scandinaves, exposés à Buffalo en 1913, cette jeune génération d’artistes canadiens forme en 1920 le « Groupe des Sept » (Harris, MacDonald, Lismer, Varley, Carmichael, Johnston, Jackson) qui ont joué un rôle important dans la définition, pour la première fois au Canada, d’un style de représentation des paysages d’Amérique du Nord. Ils y interrogent le rapport de l’homme à la nature, en y incluant une dimension sacrée.
Si dans la plupart des sections, les thèmes et les œuvres dégagent un sentiment de sérénité, propice à la contemplation paisible et à l’élévation spirituelle, il est une partie de cette exposition qui prend le sujet par l’autre bout : les Paysages dévastés explorent non plus ce qui élève l’homme mais ce qui le rabaisse et ce qui le ronge, le mal qui le pousse aux pires exactions. L’arrivée de la Première guerre mondiale précipite la société, dans la noirceur et la douleur et les artistes n’y sont pas exempts. Ce sont eux qui vont traduire en peinture, à travers des paysages désolés et chaotiques, la blessure infligée par la guerre aux peuples. Avec une interrogation : le sacrifice en valait-il la peine ?
La visite s’achève sur une ouverture, qui fait écho à ce titre d’exposition à double sens « Au-delà des étoiles ». En effet les artistes ont questionné la nature qui les entoure et ont donné au paysage une dimension mystique, spirituelle où l’homme projette son esprit « au-delà des étoiles », mais dans cette section il faut prendre ce titre dans son sens littéral : la contemplation de la nature par les artistes a aussi eu lieu en direction du ciel. Là où la science, balbutiante à cette époque, et le spiritisme, se croisent, l’Univers s’offre à nos yeux à travers ceux des peintres. Visions symboliques, abstraites, naturalistes se côtoient pour nous rappeler à notre condition d’homme, si petits face à cette immensité.
– La rédaction de Narthex
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