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Henri Matisse, ses vitraux et l’espace transfiguré à la chapelle de Vence

Pour cette seconde publication de notre série d'articles consacrés à l’art contemporain du vitrail au sein de édifices religieux, voici les vitraux d'Henri Matisse à la Chapelle du Rosaire de Vence (Alpes Maritimes) et l'évocation par le P. Michel Brière de sa rencontre avec ce lieu : « une expérience artistique mémorable ».
Publié le 23 septembre 2020

Conçue par Henri Matisse, la Chapelle du Rosaire à Vence est entièrement réalisée sous sa maîtrise : architecture, vitraux, peintures et ornements. Elle n’est pas une sculpture pour un regard extérieur mais une « installation » à pénétrer et à éprouver de l’intérieur. Il y aurait d’ailleurs un abus à ne s’intéresser qu’aux vitraux : en ce sens l’œuvre de Matisse initie pleinement à considérer le vitrail comme un élément, certes vital, de l’expérience sensible et liturgique de l’espace architecturé.

Je me souviens de ma première visite. Un mois de février me semble-t-il…Comment entrer avec un regard innocent ? On ne peut ignorer que l’ensemble est signé d’un artiste unanimement reconnu. Je crois m’être comporté comme dans un musée, passant d’un « tableau » à un autre. En réalité, des dessins noirs sur panneaux de céramique blanche – une simple terre cuite vernissée. Et avoir fait face à des verrières sur toute la hauteur des murs avec leur motif végétal très stylisé en vert, jaune et bleu. Celle dédiée à l’Arbre de vie évoquant davantage une tenture.

Le jaune, dépoli, retient le regard à l’intérieur alors que la transparence des deux autres couleurs plus intenses, l’ouvre sur l’extérieur. Je m’apprêtais à sortir – dois-je le dire – un peu déçu. Et soudain, un rayon de soleil a transfiguré l’espace. Je n’étais plus spectateur en face, j’étais acteur à l’intérieur d’une œuvre. Dans le creuset où couleurs et dessins se mêlent et font alliance.

Un ruissellement de couleurs baignait la chapelle et venait teinter non seulement la blancheur des murs, du sol et de la céramique – mais aussi la nappe de l’autel, les bancs et les stalles. Le chatoiement des couleurs caressait la pureté du trait noir sur la froide brillance de la céramique. J’y ai vu le travail acharné des artistes pour trouver le geste juste, fécondé par la grâce, consacré par la lumière.

VUE DES BANCS DE LA CHAPELLE DU ROSAIRE DE VENCE – PHOTO © D. R.

Expérience esthétique mémorable. Reconnaissons que les vitraux y appartiennent à une conception globale où architecture et arts font alliance sous la houlette du maître. Aidé par un frère Dominicain et supervisé par l’architecte Auguste Perret, Matisse est bien le garant d’une conception unifiée. (1) Les parois de verre y jouent un rôle au moins équivalent aux murs et aux panneaux. « L’aboutissement de toute une vie de travail » selon l’artiste lui-même.

Commandée à Matisse par les Dominicaines, à l’initiative d’un de ses anciens modèles, Monique Bourgeois, devenue sœur Jacques-Marie, la Chapelle du Rosaire fut inaugurée en 1951. Trois avant sa mort de l’artiste.

+ Michel Brière

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(1) Je regrette de ne connaître guère de descendance à une telle réussite. A l’exception compréhensible justement de Saint Joseph du Havre du même Auguste Perret où les verres colorés intègrent totalement les parois de l’édifice.

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