C’est au cœur de la ferveur catholique propre au canton de Fribourg que Marc Moret passe son enfance, son adolescence et sa jeunesse. La présence religieuse est évidente dans le cercle familial ainsi que dans la communauté villageoise et se déploie dans les lieux de culte. Parmi les signes de dévotion, mis à part les peintures murales, les autels décorés et les innombrables ex-voto, les reliquaires et les gisants sont encore très fréquents dans les sanctuaires à cette époque précédant le Concile Vatican II. Marc Moret est marqué au plus profond de lui-même par l’ensemble de ces pratiques, de ces rituels et de ces croyances qui appartiennent à la mémoire collective. Selon un principe d’étrange filiation, il conçoit à partir de la cinquantaine, avec autant de liberté que d’opiniâtreté, les œuvres les plus originales et les plus déconcertantes de sa production. Ces hauts et bas-reliefs présentent à maints égards des parentés avec les reliquaires et les gisants, ouvrages de moniales, tant quant au choix des matériaux et des conditions de création qu’à celui du rôle de l’œuvre et des vertus qui lui sont attribuées.
Ceux-ci sont réalisés notamment avec des os et des mèches de cheveux ainsi qu’avec des objets ayant appartenu à des membres de sa famille : des articles de mercerie de sa défunte mère ou des parties du lit de ses grands-pères, qu’il considère comme des pièces commémoratives. Affranchi des règles, il crée des productions singulières en enfouissant ces objets dans un magma de colle comme pour les figer, fixer le passage irrémédiable du temps.
Sa production n’est toutefois pas seulement le reflet de ses douleurs personnelles ; sa recherche, de plus grande ampleur, touche à la condition humaine. Ses créations nous relient aux interrogations existentielles et philosophiques auxquelles nous sommes tous confrontés, qui dépassent les mots.
L’exposition réunit des collages et des peintures de Marc Moret récemment présentés, notamment à Paris, Tokyo et Lausanne, et d’autres qui n’ont encore jamais été montrés au public. Les nombreuses pièces d’art sacré, dont plusieurs reliquaires et un gisant, proviennent des réserves de musées ainsi que d’églises, de couvents et de monastères de la région fribourgeoise, en Suisse.
Par, Lucienne Peiry