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Des écrits mystiques à la réflexion sur l’Art et la Théologie

Voici la première parution de la Saison II proposée par Martine Petrini-Poli : un nouveau blog consacré aux relations qu’entretiennent l’Art et la Théologie, en premier lieu dans l’œuvre du jésuite allemand Karl Rahner (1904-1984). Cette nouvelle séquence succède à l'exploration depuis six ans des écrits mystiques chrétiens, qui font souvent appel à une formulation symbolique pour tenter d'exprimer l'indicible. Ainsi est venue tout naturellement l'idée d'interroger sur l'Art et la Théologie.
Publié le 03 octobre 2019
Écrit par Martine Petrini-Poli

Depuis 2013, notre blog portait sur les écrits mystiques chrétiens. Nous avons ainsi présenté le mysticisme espagnol (Jean de la Croix, Thérèse d’Avila, Ignace de Loyola), arménien (Grégoire de Narek) et allemand avec le courant de la mystique rhénane (Hildegard von Bingen, Maître Eckhart, Jean Tauler, Henri Suso) et Thomas a Kempis. Ce courant est essentiellement porté par des moines et des fondateurs ou réformateurs d’ordres religieux. Nous avons vu qu’une langue figurée, symbolique est seule capable de tenter de rendre compte de l’expérience mystique. Il nous a paru opportun de nous interroger, à travers un nouveau blog, sur les relations qu’entretiennent l’Art et la Théologie, d’abord dans l’œuvre du jésuite allemand Karl Rahner (1904-1984).

Une esquisse de théologie de l’art

Un article de Denis Hétier, « Esquisse d’une théologie fondamentale de la création artistique. Les écrits théologiques sur l’art chez Karl Rahner (1954-1983) » in Transversalités 2014/2 n°130, pages 111 à 128, a attiré notre attention. Il est ainsi résumé :

Si Karl Rahner n’a pas élaboré une théologie de l’art en tant que telle, une douzaine d’écrits de circonstance témoignent cependant d’une véritable réflexion dans ce domaine. L’intention de cette étude est de prendre en considération cette dimension peu connue et peu valorisée de la pensée rahnérienne, tout en en interrogeant l’actualité et la pertinence dans la recherche contemporaine du dialogue entre théologie et art. Une première présentation de sept de ces écrits, rédigés entre 1954 et 1983, manifeste les permanences et les évolutions de cette réflexion et permet d’en dégager les axes et les enjeux théologiques principaux. Ces textes relèvent épistémologiquement d’une théologie pratique, et constituent ce que nous pourrions appeler « l’esquisse d’une théologie fondamentale de la création artistique ».

Qui est Karl Rahner ?

Théologien catholique allemand, auteur d’une oeuvre considérable, tant par la profondeur de ses vues que par la diversité des sujets qu’elle embrasse. Né en 1904 à Fribourg-en-Brisgau, dans un milieu familial chrétien, Karl Rahner entra dans la Compagnie de Jésus en 1922, et fut ordonné prêtre en 1932. Durant les deux années suivantes, il suivit les cours de philosophie de Martin Heidegger à l’université de Fribourg.

Tympan du porche de la cathédrale de Fribourg-en-Brisgau, Nativité photographie © lavieb-aile.

En 1936, il acheva sa thèse de doctorat en philosophie, qui portait sur La métaphysique de la connaissance chez Thomas d’Aquin (publiée en français en 1968 sous le titre L’Esprit dans le monde). Dans l’introduction de sa thèse, il écrit : « On pourrait objecter que j’interprète saint Thomas à la lumière de la philosophie moderne. Si c’est le cas, loin de le considérer comme un reproche je l’entends comme un compliment. Car en quoi saint Thomas peut-il m’intéresser s’il n’a rien à voir avec les questions qui se posent à la philosophie aujourd’hui ? » En pleine crise moderniste, sa thèse en philosophie scolastique fut jugée infidèle à la pensée de saint Thomas.

La même année, il se rendit à Innsbruck, pour entreprendre une thèse de doctorat en théologie ayant pour sujet : La pensée patristique sur le Coeur transpercé du Sauveur comme source de l’Église, thèse publiée de façon posthume en 1999. Sa réflexion sur la relation mutuelle entre Dieu et l’homme se manifeste dans deux ouvrages de 1937, au début de son activité théologique à Innsbruck, Appels au Dieu du silence – Dix méditations (Worte ins Schweigen), publié en 1947, et L’homme à l’écoute du Verbe (Hörer des Wortes), publié en 1941. Les mots silence et écoute sont les mots-clés de cette dimension mystique puisée à Ignace de Loyola.

En 1938, quelques mois après l’Anschluss, les nazis fermèrent la Faculté d’État de théologie d’Innsbruck, où Rahner donnait des cours depuis un an. Interdit de séjour en Allemagne, il se réfugia à Vienne pour enseigner la théologie aux laïcs. Dix ans plus tard, il reprit son poste de professeur à la Faculté reconstituée d’Innsbruck : ses leçons portèrent essentiellement sur la création, la grâce, le péché originel et la doctrine de la justification. Au cours des deux décennies suivantes, Rahner multiplia ses activités : il publia ses Écrits théologiques (Schriften) en 16 tomes, participa à la refonte du Lexikon für Theologie und Kirche (Lexique de théologie et d’église) en 10 volumes, prêcha des retraites, donna plusieurs conférences en Europe.

En 1962, Jean XXIII le nomma expert à la Commission théologique du concile de Vatican II, où il joua un rôle capital dans la préparation de Lumen gentium (1964) et de Dei Verbum. L’apport théologique de Rahner concerne spécialement la Trinité, la christologie, la grâce, l’Église et les sacrements. Son oeuvre maîtresse est le Traité fondamental de la foi, Introduction au concept du christianisme (Grundkurs des Glaubens, Einführung in den Begriff des Christentums), paru en en 1976 (tr. fr. 1983), présentation systématique issue de cours dispensés à Munich et véritable somme théologique du christianisme contemporain. Karl Rahner est décédé en 1984 à Innsbruck, à l’âge de quatre-vingt ans.

Martine Petrini-Poli

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