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Sermon 20 pour l’Ascension de Jean Tauler

Après Maître Eckhart, nous poursuivons notre découverte des mystiques rhénans avec la figure de Jean Tauler (1300-1361). Nous prenons un peu d'avance sur le calendrier liturgique avec le 20e sermon, qui est destiné à la célébration de l'Ascension.
Publié le 05 avril 2018
Écrit par Martine Petrini-Poli

Nous connaissons cinq sermons de Jean Tauler sur la fête de l’Ascension. Ils partent tous d’une citation biblique, mais c’est le sermon 20 qui cite le verset de Marc « Le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel… ». Cette homélie est une invitation à suivre le chemin du Maître, car il est « la Voie, la Vérité et la Vie ».

Sermon 18 pour l’Ascension Et il leur reprocha leur incrédulité…
Sermon 19 pour l’Ascension Montant dans les hauteurs il a emmené des captifs. (Ep 4,8)
Sermon 20 pour l’Ascension Le Seigneur Jésus fut enlevé au ciel. (Mc 16,19)
Sermon 21 pour l’Ascension Vous serez alors mes témoins à Jérusalem… (Ac 1,8)
Sermon 22 pour l’Ascension Alors on tira au sort et le sort tomba sur Matthias. (Ac 1,26)
Sermon pour le dimanche après l’Ascension Soyez donc sages et sobres en vue de la prière.

« Pour aller où je m’en vais, vous savez le chemin »

« Le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel… ». Les membres du Corps du Christ doivent suivre leur chef, leur tête, qui est monté aujourd’hui. Il nous a précédés, pour nous préparer une place (Jn 14,2), à nous qui le suivons, de sorte que nous puissions dire avec la fiancée du Cantique des Cantiques : « Entraîne-moi après toi » (1,4)

Voulons-nous le suivre ? Nous devons aussi considérer le chemin qu’il nous a montré pendant trente-trois ans : chemin de pauvreté, de dénuement, parfois très amers. Il nous faut suivre tout à fait le même chemin si nous voulons parvenir, avec lui, au-dessus de tous les cieux. Quand même tous les maîtres seraient morts et tous les livres brûlés, nous trouverions toujours, en sa sainte vie, un enseignement suffisant, car c’est lui-même qui est la voie et pas un autre (Jn 14,6). Suivons-le donc.

De même que l’aimant attire le fer, ainsi le Christ aimable attire à lui tous les cœurs qu’il a touchés. Le fer touché par la force de l’aimant est élevé au-dessus de sa manière naturelle, il monte en le suivant, quoique ce soit contraire à sa nature. Il n’a plus de repos jusqu’à ce qu’il se soit élevé au-dessus de lui-même. C’est ainsi que tous ceux qui sont touchés au fond de leur cœur par le Christ ne retiennent plus ni la joie ni la souffrance. Ils sont élevés au-dessus d’eux-mêmes jusqu’à lui…

La comparaison de l’aimant qui attire le fer vise à montrer la relation intime du Christ avec ses disciples, ainsi que le mouvement ascensionnel initié par le Christ vers le Père. La suite de l’homélie dévoile tout le sérieux de la liberté humaine. La grâce divine est largement offerte à tous les hommes, mais inégalement reconnue par chacun.

Giotto di Bondone (1266-1337), Ascension, Chapelle des Scrovegni, Padoue, Italie

Quand on n’est pas touché, il ne faut pas l’imputer à Dieu. Dieu touche, pousse, avertit et désire également tous les hommes, il veut également tous les hommes, mais son action, son avertissement et ses dons sont reçus et acceptés d’une façon bien inégale… Nous aimons et nous recherchons autre chose que lui, voilà pourquoi les dons que Dieu offre sans cesse à chaque homme restent parfois inutiles… Nous ne pouvons sortir de cet état d’âme qu’avec un zèle courageux et décidé et avec une prière bien sincère, intérieure et persévérante. (trad. Cerf, 1991, p. 149)

L’Ascension (en latin « ascensio« , en grec « analepsis« ) se passe quarante jours après Pâques ; elle désigne le moment où le Christ Jésus monte au ciel, après sa résurrection d’entre les morts. Selon Saint Thomas d’Aquin, le Christ affirme ainsi sa divinité, Il ouvre à notre nature humaine le chemin vers Dieu et Il envoie l’Esprit-Saint à ses apôtres et à l’Eglise. Cet épisode est décrit à la fin de l’Evangile selon Luc (XXIV, 51) : Jésus emmène ses apôtres vers Béthanie, un village de Judée où il aimait se retirer pour fuir les persécutions de Jérusalem. « Et il advint, comme il les bénissait, qu’il se sépara d’eux et fut emporté au ciel. Pour eux, s’étant prosternés devant lui, ils retournèrent à Jérusalem en grande joie, et ils étaient constamment dans le Temple à louer Dieu« .

BENVENUTO TISI DIT « IL GAROFALO », Ascension du Christ, 1510-1520, Galerie d’art antique de Rome

D’après Les Actes des Apôtres (I, 1-11), également écrits par Luc, c’est au terme de 40 jours d’apparitions et d’entretiens que Jésus a quitté les siens pour monter au ciel : « Théophile, j’ai raconté dans le premier livre tout ce que Jésus a fait et enseigné jusqu’au jour où, après avoir donné, par l’Esprit-Saint, ses ordres aux apôtres qu’il avait choisis, il fut enlevé (au ciel). C’est à eux aussi qu’après sa Passion il se montra vivant, avec force preuves, leur apparaissant pendant quarante jours et parlant des choses du Royaume de Dieu.« 

Si Jésus remonte au ciel, c’est pour envoyer son Esprit-Saint auprès de ses disciples : Lorsque le Saint-Esprit descendra sur vous, vous recevrez de la force, et vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’à l’extrémité de la terre. » Quand il eut dit cela, il fut élevé (de terre) sous leur regard, et un nuage le déroba à leurs yeux. Et comme ils avaient la vue fixée vers le ciel pendant qu’il s’en allait, voici que deux hommes, vêtus de blanc, se présentèrent à eux et (leur) dirent : « Hommes de Galilée, pourquoi restez-vous à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui, d’auprès de vous, a été enlevé au ciel, ainsi viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller au ciel. »

Martine Petrini-Poli

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