Seigneur ouvre mes lèvres

Nous associons un peu vite le psaume 50 à une attitude de lamentation teintée même d’une couleur tellement sombre qu’elle suggère une situation misérable. Le titre de ce psaume « Miserere » ne doit pas occulter sa nature véritable de louange et d’espérance.
Publié le 02 mars 2018
Écrit par Emmanuel Bellanger

La liturgie des Heures ouvre chaque journée sur un verset du psaume 50 : « Seigneur, ouvre mes lèvres et ma bouche annoncera ta louange ». Nous voici invités dans ce psaume à nous situer avec justesse sur le chemin du carême. C’est la nature d’un texte poétique de nous faire parcourir un chemin intérieur ; qu’en est-il de ce psaume 50 ?

Il s’ouvre dans ses premiers versets sur un demande de pardon insistante « efface – lave – purifie » de celui qui se reconnaît pécheur, qui se confie à la miséricorde divine, qui chante sa joie d’être sauvé. Nous sommes bien dans la joie véritable du chrétien : celle de la confiance lucide qui connaît sa faiblesse et met sa force dans le Seigneur.

C’est exactement ce que chante Marc-Antoine Charpentier (1644-1704) dans ce Miserere dit des Jésuites qui date des années 1683/85. Nous en écoutons la première partie, la plus intéressante. Après une brève ouverture instrumentale qui crée une atmosphère plaintive, les deux premiers versets reprennent cette musique dans le style conventionnel de la lamentation : de longues tenues, des retards et appoggiatures créant de douloureuses dissonances, une courbe musicale descendante chantée par la voix de basse puis reprise par le chœur.

Le psaume se poursuit en une succession de dialogues entre basses et dessus dans une progression subtile vers un rythme de plus en plus allant, presque jusqu’à suggérer une danse sacrée. Le musicien a bien lu le psaume 50, il nous en révèle le mouvement intérieur.

Miserere mei, Deus, secundum magnam misericordiam tuam.
Et secundum multitudinem miserationum tuarum, dele iniquitatem meam.

– Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour
– selon ta grande miséricorde, efface mon péché.

Amplius lava me ab iniquitate mea : et a peccato meo munda me.
Quoniam iniquitatem meam ego cognosco : et peccatum meum contra me est semper.

– Lave-moi tout entier de ma faute, purifie-moi de mon offense.
– Oui, je connais mon péché, ma faute est toujours devant moi.

Tibi soli peccavi, et malum coram te feci : ut justificeris in sermonibus tuis, et vincas cum judicaris.
Ecce enim veritatem dilexisti : incerta et occulta sapientiae tuae manifestastis mihi.

– Contre toi et toi seul j’ai péché, ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.
– Mais tu veux au fond de moi la vérité. Dans le secret tu m’apprends la sagesse.

Asperges me hyssopo et mundabor : lavabis me et super nivem dealbabor.
Auditui meo dabis gaudium et laetitiam : et exsultabunt ossa humiliata.

– Purifie-moi avec l’hysope et je serai pur : lave-moi et je serai plus blanc que la neige.
– Fais que j’entende les chants et la fête : ils danseront, les os que tu broyais.

 

Emmanuel Bellanger

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