En effet, pour la huitième année consécutive le musée de la Visitation présente au public, dans une scénographie entièrement repensée annuellement, des ornements liturgiques différents, intégrés dans un catalogue soigné dont la diffusion nationale est assurée par Somogy. Régularité, innovation, publication «livre d’art» en font un cas unique en France pour les textiles d’église.
Et chaque ouvrage est construit autour d’une thématique différente, permettant d’éclairer des secteurs de recherche historiques plus ou moins méconnus, cette année les Œuvres brodées pour la Visitation aux XIXe et XXe siècles.
Florence Valantin commence par décrire en détail l’évolution des processus de fabrication et de vente des ornements dans le courant du XIXe siècle à Lyon, dans une ville qui fournit à l’époque les ¾ de la soierie mondiale : la naissance des ateliers de fabrication d’ornements d’église qui remplacent le fabricant donnant des ordres à l’extérieur, l’apparition du catalogue de vente par correspondance peu avant 1860, la multitude de métiers cachée derrière la confection d’une chasuble, la coexistence du décor floral et du néogothique, « redécouverte d’un art chrétien médiéval idéalisé ». L’auteur dépeint un monde nouveau, entre foi profonde, maîtrise artistique, adaptation à l’ère industrielle et recherche de baisse des coûts.
La broderie quant à elle reste encore une œuvre manuelle. Mais l’on perçoit mieux, grâce à ce riche catalogue, les relations entre les fournisseurs des différents marchands et comment une même image était utilisée en broderie par l’un ou l’autre atelier de broderies.
Si l’on examine le saint Mathieu de la notice 32 du catalogue de Moulins, daté de 1899, il a sa comparaison sur une chasuble de Quarante (Hérault) datée aussi de 1899 et fournie par la maison Monnat de Toulouse. A l’église Saint-Baudile de Nîmes (Gard), la marque de la Maison Jullian figure sur la doublure. Cette entreprise ne semble pas faire de publicité sur ses activités avant 1895. Les trois images ne sont pas strictement identiques mais ont assurément une même source d’inspiration ; une est positionnée inversement des deux autres, ce qu’un calque permet très aisément ; ce calque, percé de petits trous, peut être utilisé bien des fois avant de se fatiguer.
L’image du Bon pasteur de la page 97 du catalogue de Moulins a fait l’objet de copies plus ou moins réussies, notamment à Combas (Gard) et à Saint-Hippolyte-du-Fort (Gard). Ces broderies sont précieusement conservées, récupérées lorsque l’ornement est usé et cousues sur de nouveaux supports.
Pour plus de développements et notamment les informations pratiques, découvrez ici le dossier de presse de l’exposition « En tous points parfaits, Oeuvres brodées pour la Visitation aux XIXe et XXe siècles » présentée jusqu’au 24 décembre 2014 au Musée de la Visitation de Moulins.
Josiane Pagnon
Crédits photographiques : ville de Moulins, J.-M. Teissonnier : fig. 1-3, 5, 8. J. Pagnon : fig. 4, 9, 10. CR Languedoc-Roussillon, M. Kérignard, fig. 6