Une histoire
En 1978, l’architecte Charles-Gustave Stoskopf bâtissait une église selon l’image que les chrétiens avaient d’eux-mêmes et de leur mission : une communauté enfouie au cœur du monde, grain de blé semé au milieu des tours environnantes, présence discrète mais attentive à la vie de de ses frères. Cette église Notre-Dame de Créteil atteignit pourtant à la notoriété : c’est son image qui ornait le manuel de catéchisme « Pierres Vivantes ».
Une cathédrale pour aujourd’hui
En 2015 nous ne sommes plus dans le même monde, les sensibilités ont évolué, les attentes de l’homme contemporain sont multiples : certes l’Eglise diocésaine reste fidèle à la mission du temps de sa fondation. Le synode diocésain actuellement en cours le rappelle : « Avec Lui prendre soin les uns des autres et partager à tous la joie de l’Evangile ». Le déploiement de la cathédrale se veut une réponse à la deuxième partie du programme synodal : l’annonce de l’Evangile dans le monde d’aujourd’hui. Et cela passe par une nouvelle visibilité de cette cathédrale, toujours implantée sur les fondations de la cathédrale primitive, signe de fidélité à l’histoire du diocèse et son souci de présence au monde.
Cette présence se manifeste d’une manière renouvelée : étroitement uni à l’espace de la cathédrale, comme une couronne qui l’entoure en partie, un nouvel espace dit « Espace Culturel » offre ses installations au dialogue avec les acteurs de la vie culturelle à Créteil et en Val-de-Marne. Espace cultuel et espace culturel sont liés en une architecture conçue comme un unique ensemble mais clairement identifiés chacun dans son domaine propre.
Une visite de la cathédrale
Extérieurement la cathédrale se présente comme une coupole irrégulière constituée de deux coques de bois se rencontrant à l’image de deux mains jointes pour la prière. Ces deux coques ne sont pas égales entre elles : elles sont conçues pour se rejoindre exactement à la verticale de l’autel. Ces coques de bois ont reçu un traitement spécial pour affronter les intempéries et le vieillissement inévitables. Elles sont l’œuvre de l’agence Architecture-Studio qui a profondément compris la nature du projet.
Extérieurement la cathédrale se présente comme une coupole irrégulière constituée de deux coques de bois se rencontrant à l’image de deux mains jointes pour la prière.
Les deux coques ménagent entre elles un espace de 65 mètres sur l’axe est-ouest. Un grand vitrail d’Udo Zembok, comme un arc-en-ciel, est éclairé tout au long du jour selon la progression du soleil : à l’image des cathédrales gothiques, Notre-Dame de Créteil s’inscrit dans l’univers et transfigure par ce vitrail le chemin de la vie, du matin jusqu’au soir, accueillant la lumière venue d’En-Haut.
Un aménagement liturgique remis en cause
L’aménagement du chœur est le fruit d’une réflexion approfondie entre les architectes, les souhaits des responsables du diocèse et les théologiens liturgistes. Le premier projet – qui ne fut pas retenu – prévoyait un emmarchement et la fermeture du chœur par un mur de fond qui avait pour résultat de rompre la belle coque intérieure et créait une rupture. D’autre part, cet emmarchement risquait de poser quelques problèmes en cas de célébration qui regroupe de nombreux ministres, ce qui est fréquent dans une cathédrale.
L’aménagement adopté supprime cet emmarchement. Le fond du chœur laisse visibles les poutres qui soutiennent l’intérieur de la double coque jusqu’au sol, l’ensemble des membres de l’assemblée, ministres et fidèles, sont emportés dans le même geste architectural. Ce fond de chœur présente au regard une grande croix en bois doré et des plaques de laiton qui évoquent le Buisson Ardent ou le feu de Pentecôte ou encore la Résurrection du Christ, œuvre des plasticiens Véronique Folhen et Stéphane Durand. Au sentiment de fermeture que suggérait le premier projet s’est substitué celui d’une ouverture vers le Mystère.
L’autel et l’ambon viennent de la cathédrale précédente marquant ainsi la continuité avec l’histoire de ce lieu.
La cathèdre, siège de l’évêque, le siège de présidence et les douze autres sièges construits en bois grisé comme ceux de la nef sont l’œuvre de la plasticienne Anne Bernot.
Un mobilier, une statuaire contemporaine
Face au chœur se trouvent le caveau des évêques et les Fonts baptismaux constitués d’une belle cuve en laiton, créés également par Anne Bernot. Les deux vitraux qui illuminent cet espace proviennent de l’ancienne cathédrale, là encore, signes de la continuité de la présence de l’Eglise.
Au centre de cet espace est conservée la Sainte Réserve sur une colonne eucharistique. Des personnages en demi-relief sur le tabernacle circulaire en laiton et bronze y évoquent la nuée, signe de la présence de Dieu, lieu de silence offert au cœur du monde agité.
C’est l’artiste Françoise Bissara-Fréreau qui a sculpté cette colonne ainsi que la statue de Notre-Dame de Créteil installée à droite du chœur. Voici comment l’artiste présente sa sculpture :
« J’aime le thème de Marie de l’Apocalypse, première à avoir dit oui au Mystère, à la frontière du créé et de l’incréé. Le mouvement de son regard se prolonge dans la main de tendresse humaine pour introduire la contemplation de l’enfant Jésus nouveau-né. » Statue de bronze patiné bleu et or, Notre-Dame de Créteil oriente la prière de ceux qui viennent à ses pieds vers Celui qu’elle porte : le Christ.
La capacité d’accueil de la cathédrale a été doublée sur la même surface au sol, tout simplement par la construction d’une vaste tribune au centre de laquelle a été installé l’orgue construit en 1967 par le facteur Curt Schwenkedel pour l’Association Valentin Haüy, au service des musiciens aveugles. L’association n’ayant plus l’usage de cet instrument en a fait don pour un euro symbolique à la cathédrale de Créteil : il y a été agrandi, remonté et réharmonisé par le facteur Bernard Dargassies.
L’espace culturel
Séparé de ces lieux consacrés à la prière et au culte, l’espace culturel offre ses galeries et ses salles pour des expositions, des concerts ou des conférences, sa cafétéria, tous lieux de rencontres, de dialogues et de découvertes.
La cathédrale, signal au milieu du monde
En sortant de la cathédrale, la sculpture de Benoît Mercier sur la façade, qui évoque le Christ ouvrant les bras nous rappelle que c’est Lui qui accueille à travers la communauté chrétienne du diocèse.
Le clocher dont la finesse accentue l’impression d’élan signale une présence, invite ceux qui passent, questionne ceux qui doutent, étonne ceux qui ignorent. Les trois cloches qu’il abrite proviennent d’une église d’Alger, et ont été données au diocèse. Là encore : signe de passage, de dialogue au cœur d’une cité habitée par de très nombreuses et diverses populations, venues du monde entier, porteuses des cultures et des religions du monde.
Mais une cathédrale ne serait que peu de choses si elle n’était signe d’une vie dense, ouverte, féconde. Monseigneur Michel Santier, évêque de Créteil, trace ainsi la route qu’ouvre la cathédrale :
« Au-delà du défi architectural, l’essentiel est dans la dynamique d’Eglise que porte ce projet. La cathédrale déployée devient signe visible de notre Eglise en Val-de-Marne : jeune, dynamique et présente dans la cité. Elle sera aussi, demain plus qu’hier encore, lieu de rassemblement, de liturgie et d’accueil dans l’esprit de la nouvelle évangélisation souhaitée par notre Eglise. »
Emmanuel Bellanger
Octobre 2015