Le Crac des Chevaliers, bâti à l’ouest de la Syrie actuelle, domine et protège la plaine de Homs ; elle contrôle la route qui mène à la mer. Le site est fortifié dès l’Empire romain, puis lors de la conquête arabo-musulmane. Saisi par les Croisés en 1099, puis de nouveau en 1110, il est finalement cédé en 1142 par Raymond II, comte de Tripoli, à l’ordre religieux militaire des Hospitaliers. Commencent alors de vastes campagnes de construction qui font du Crac une forteresse exceptionnelle par sa superficie et son ampleur.
Le visiteur suit alors l’histoire de la construction de la forteresse. Les Hospitaliers, dits aussi « ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem » ou aujourd’hui « ordre de Malte », construisent, sur l’emplacement d’un édifice du XIe siècle disparu, une première enceinte ainsi que la chapelle toujours visible aujourd’hui, à la fin du XIIe siècle. Au fil du XIIIe siècle sont ajoutés les éléments d’architecture qui font la renommée du château : la longue enceinte extérieure, les talus ou glacis vertigineux ceinturant les tours de la première enceinte, la galerie à arcades de la cour, d’un style gothique très pur.
L’architecture militaire est par définition austère et pragmatique, cependant la dimension religieuse de l’ordre des Hospitaliers permet un apport ornemental discret par le biais du vocabulaire architectural gothique. Une magnifique galerie voûtée d’ogives subsiste, tandis que des chapiteaux sculptés de feuilles d’acanthes et de vignes sont présentés grâce à des moulages à l’échelle de l’ancien Musée de Sculpture comparée, vénérable ancêtre de la cité de l’Architecture. Le décor pictural de la chapelle, qui n’a pu, pour cause, faire le voyage jusqu’à Paris, est représenté par un exemple contemporain d’iconographie templière : quelques belles fresques de la chapelle des templiers de Cressac (près d’Angoulême) sont ainsi exposées.
La forteresse passe en 1271 dans le giron des Mamelouks, qui vont préserver et même augmenter cette précieuse place forte. Elle perd son rôle militaire avec la fin des Croisades, et passe, comme toute la Syrie, sous domination ottomane en 1516 ; garnison d’importance secondaire, elle traverse les siècles sans dommage majeur. Les voyageurs occidentaux redécouvrent le site au début du XIXe siècle : des ouvrages et des photographies diffusés en France le font sortir de l’ombre. L’imaginaire orientaliste et romantique d’alors s’en empare.
L’historien Paul Deschamps se passionne pour le Crac des chevaliers dès 1926 et mène deux missions qui vont mener à une meilleure connaissance du site. Le site est acquis en 1933 par la France et bénéficie d’importants moyens pour sa restauration. Il est promu dans l’exposition coloniale Internationale de 1931 comme l’un des fleurons de la culture coloniale française, « le témoin le plus majestueux de l’art français en Orient ».
Finalement, si le transfert de propriété permet à la France de mener le chantier de restauration de 1934-1936, il est d’une légalité douteuse : à la fin de la guerre, la Syrie nouvellement indépendante exige la restitution du Crac, qui est entérinée en février 1949. La Syrie prend la suite, dans les années 50, des travaux de restaurations et d’aménagement du site pour les visiteurs. Ainsi mis en valeur, le Crac tient son rang parmi les grands sites touristiques du pays ; il apparaît en 1977 sur un billet de banque syrien. L’intérêt des archéologues syriens et internationaux pour la forteresse ne faiblit pas, et la situation de celle-ci depuis le début des années 2010, dans un pays ravagé par la guerre, inquiète les observateurs. Depuis 2013, le Crac compte parmi les cinquante-cinq biens inscrits sur la Liste du patrimoine mondial en péril par l’Unesco.
Vidéo 360° du Crac des Chevaliers réalisée à l’occasion de l’exposition Sites éternels présentée au Grand Palais du 14 Décembre 2016 au 9 Janvier 2017.
Cette exposition est en partenariat avec L’Œuvre d’Orient.
Toutes les informations pratiques pour visiter l’exposition en cliquant ici.