Comment accompagner ces jeunes qui dérivent vers la violence, la délinquance, dont la famille ne joue pas le rôle éducatif attendu ? Ici, les premières images du film « La tête haute » l’expriment avec force, c’est au niveau de l’enfant Malony que la réalisatrice se situe. La caméra est à sa hauteur, très proche de lui. Elle le suit, l’accompagne et au-dessus de sa tête, les adultes s’agitent et dialoguent pas toujours sereinement. Nous sommes dans le bureau de la juge pour enfants et on apprend très vite que ce lieu est déjà bien connu de l’enfant qui n’a que 6 ans.
La bande son précède les images. Au long du film, le discours de l’adulte sera sans cesse présent pour guider l’enfant de multiples manières. Très vite l’enfant du début est adolescent et ses bêtises le conduisent au blocage, tête baissée, casquette rivée sur la tête, regard fuyant, ironie sur les lèvres.
Les séquences se succèdent très rapidement, au rythme de la violence de cette jeunesse qui manque de mots pour s’exprimer, trop soumise à la force de ses pulsions du moment pour prendre du recul et se projeter vers l’avenir. » Anne Dagallier
La situation va très vite se compliquer, nécessitant la présence d’un avocat. La mère totalement immature n’est bien sûr jamais responsable et la violence est là, toujours latente. Le jeune Malony réclame l’amour de sa mère mais la juge l’affirme sans appel : « On n’est pas là pour t’aimer mais pour t’aider. Qu’est-ce que tu veux faire de ta vie ? »
Tout au long du film, les apprentissages, les espoirs, les explosions, les bagarres vont se répéter, la caméra restant la plupart du temps rivée sur Malony en très gros plans. Comme lui nous sommes le nez dans les problèmes. Les séquences se succèdent très rapidement, au rythme de la violence de cette jeunesse qui manque de mots pour s’exprimer, trop soumise à la force de ses pulsions du moment pour prendre du recul et se projeter vers l’avenir.
Pourtant la juge croit en lui, l’éducateur le rappelle inlassablement. « Tu vaux mieux que la haine ». Quelle patience dans ces métiers d’accompagnement au jour le jour où l’éducateur prend des coups, des insultes mais continue à croire que le temps fera son œuvre et que le jeune a un avenir.
Les larmes coulent régulièrement, la confiance est invoquée, l’amour est au rendez-vous. Malony n’est pas un gros dur, il a un cœur. Si ce jeune homme est capable de prendre des risques pour éviter un avortement, tout espoir est permis. La morale est sauve.
Le film est pimenté de quelques gestes symboliques. Au début, Malony tient à peine un crayon et écrire une lettre semble un exercice insurmontable. Plus tard, il signera sans difficulté son entrée en centre éducatif fermé après un séjour en prison.
Mais surtout le geste de la juge lui tendant la main et lui disant : « Prends les mains qu’on te tend, c’est maintenant. » Ce qui transparait clairement dans l’attitude des adultes (sauf la mère !), c’est que c’est aux jeunes de prendre leur vie en main. Personne ne peut pas faire sans leur volonté. On ne peut pas sauver quelqu’un malgré lui.
Le saviez-vous ? Le festival de Cannes possède un jury oecuménique depuis 1974 !
A Cannes, à Berlin et dans bien d’autres festivals, rendez-vous capitaux dans le monde du cinéma, un jury œcuménique se tient en marge du festival officiel en toute indépendance. Il est constitué de six membres de cultures et de pays différents, trois catholiques et trois protestants compétents dans le domaine du cinéma. Les membres du jury assistent à toutes les projections et prennent le temps de l’échange autour de chaque film pour y mettre en avant les valeurs humaines qu’il défend, comme le montre cette vidéo du festival de Cannes de 2014 : le prix du jury oecuménique de 2014.
Ce type de jury aura donc une sensibilité particulière à des films qui touchent à des questions existentielles, des films qui mettent en œuvre de profondes valeurs d’espérance, de dignité de l’homme, qui invitent à changer son regard sur l’autre. Ainsi l’humanité est au cœur et le spectateur ne ressort pas indemne de la projection d’un tel film. Cela ne sous-entend pas du tout que le film doit être religieux.
Dans une interview, des acteurs partagent leur opinion sur la définition d’un film spirituel : un film qui élève, qui tourne vers les autres. Pour visualiser cette vidéo, cliquez sur ce lien : Définition d’un film spirituel.
DECOUVREZ ICI LE JURY OECUMENIQUE 2015 ainsi que toutes leurs actualités au jour le jour.
Anne Dagallier, étudiante à l’ISTA et chargée de mission multimédias au Service National Catéchèse et Catéchuménat de la CEF.
Informations supplémentaires :
Film : La tête haute
Date de sortie : le 13 mai 2015
Réalisé par : Emmanuelle Bercot
Avec : Catherine Deneuve, Rod Paradot, Benoit Magimel…
Genre : Drame
Durée : 1h59
Pays de production : France