L’artiste
Jacques Faujour
Photographe, passeur d’histoires
Innocence d’un regarde, cabines de bain, mains caleuses, pas de deux, manèges… Sans vouloir faire un inventaire à la Prévert, nous savons que Jacques Faujour privilégie des thèmes qui reviennent tels un refrain familier. L’image ne se veut pas descriptive. Liberté est donnée à chacun de l’interpréter, de se laisser surprendre par ces moments insolites, intimes, drôles, tendres, non dénués d’humour ou de gravité. On pourrait presque entendre le ressac des vagues, les jeux des enfants, le brouhaha des marchés et aussi la sérénité d’un après-midi d’été écrasé de soleil, le silence de la solitude.
Sans doute faut-il revenir à l’arrivée de Jacques Faujour à Paris. Un peu par hasard, le voilà embarqué presque malgré lui dans l’aventure du Centre National d’Art Contemporain. Il se nourrit alors, l’air de rien, de la rencontre des artistes et de leurs œuvres. À son corps défendant, ce terreau singulier alimente sa démarche. Son œil sensible, curieux garde une grande capacité à être réceptif à la Création quelle qu’en soit l’essence. Un regard respectueux, attentif, incisif et bienveillant qui ne cesse de caractériser son travail.
Paradoxe de la photographie qui pourrait sembler être la représentation de l’éphémère, d’un moment unique, les photos de Jacques Faujour s’inscrivent finalement dans un temps long. Au premier abord, le regard suit la construction rigoureuse de l’image, s’y promène. Un détail, une ambiance retiennent l’attention et invitent à une pause, une contemplation. Puis, à suivre ses photographies au fil de presque cinquante années, on comprend qu’elles écrivent une histoire, une permanence et restituent la perception d’un monde, nous le savons aujourd’hui, en pleine mutation. Jacques Faujour savait-il qu’il serait ainsi un passeur d’histoires ?
L’arrivée du numérique bouleverse sa photo. Le noir et blanc joue sur le contraste et construit l’image par le subtil jeu d’ombre et de lumière. La couleur est plus directe, propose un nouveau souffle, diffuse une force, parfois une certaine brusquerie que l’on ne soupçonnait pas dans les précédentes images. Toutefois, la composition de l’œuvre s’appuie sur des constantes : symétrie, ligne de fuite, rigueur des plans. La sureté, l’acuité du regard du photographe fixent une image jamais recadrée. Avant lui, Henri Cartier-Bresson avait suivi cette ligne de conduite. Dans un second temps, Jacques Faujour ne garde que la photo qui répond à son intuition première et qu’il accepte de livrer à notre regard.
La sélection des photos, forcément subjective, oblige au renoncement d’autres images. Qu’importe. Elles portent toutes la marque d’un artiste qui, avec simplicité et modestie, nous offre à voir, dans un élan plein de poésie, la fragilité et la singularité de chacun de nous.
— Bernadette Boustany
Conservatrice en chef du patrimoine
Directrice du musée intercommunal de Saint-Maur
Informations pratiques
Du lundi au vendredi de 10h à 18h
Le week-end de 15h à 18h
Espace culturel de la Cathédrale Notre-Dame de Créteil
2 rue Pasteur Vallery-Radot 94000 Créteil
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