Lors des Itinéraires de la création, le sculpteur Nicolas Alquin est le premier artiste que nous avons rencontré directement dans son atelier, à Bagneux. Un atelier grandiose, immense, comme beaucoup d’artistes pourraient en rêver. A l’entrée de l’atelier, un coin chaleureux avec un poêle allumé invitait à s’asseoir. Un endroit où l’on aurait aimer rester des heures à écouter l’artiste. Car Nicolas Alquin est à l’image même du lieu : accueillant et mystérieux.
Accompagnés par l’odeur envoûtante de la cire d’abeille, un matériau qu’il aime travailler, nous avons commencé à arpenter cet immense espace. Un atelier ordonné où plusieurs sculptures étaient exposées, offertes à notre regard. Au milieu de la pièce, imposante, hypnotique, une immense sculpture a tout de suite attiré notre attention. C’est naturellement que nous nous sommes dirigés vers elle pour l’admirer de plus près.
Il s’agit d’une déposition de croix baptisée « Avec la terre » lourde de deux tonnes ! On y voit la Vierge Marie enlaçant le corps du Christ descendu mort de sa croix, accompagné de saint Jean. « Il existe beaucoup de pietà avec la Vierge et le Christ, explique Nicolas Alquin. Mais elles sont plus rares celles où il y a aussi Saint Jean ». Nicolas Alquin interprète son œuvre et explique le lien qui existe entre le passé, le présent et le futur : Le Christ est mort, cela représente le passé ; saint Jean récupère son corps, c’est le présent ; la Vierge croit, quant à elle, un futur possible. Pour la réalisation de cette œuvre, il a utilisé un bois très lourd, le kevazingo. Cette sculpture, il l’a exposée dernièrement à la cathédrale de Rouen. Rien ne semble plus adapté que l’immensité d’une cathédrale pour accueillir une telle œuvre. La densité, la grandeur, la force, mais aussi le silence qui émanent de cette œuvre nous frappent visuellement mais aussi intérieurement. Elle interroge notre humanité.
Au fil de notre déambulation, nous nous sommes rapprochés de sculptures plus modestes mais tout aussi monumentales. Des sculptures verticales prenant appui sur le sol qui s’élèvent jusqu’à devenir de véritables colonnes. Dans un dialogue incessant entre l’héritage iconographique judéo-chrétien et l’influence des sculptures arts premiers sur l’art occidental contemporain, Nicolas Alquin matérialise à travers ses œuvres une réflexion sur les relations entre le visible et l’indicible.
Ses sculptures de bois, il les travaille, les embellit avec une pierre d’agate dont il se sert pour révéler la brillance du bois. Pour leur donner aussi plus de caractère et de contraste, il n’hésite pas utiliser du bitume dilué et de de la chaux. Ces différentes matières apportent au bois austère une autre vie, une autre lumière. Au final, ses œuvres offrent une véritable présence car au-delà de la représentation ou du choix stylistique de l’artiste, ses œuvres rayonnent et nous appellent au Mystère.
Mais Nicolas Alquin ne travaille pas que le bois. C’est en entrant dans la pièce du fond de son atelier que nous découvrons d’autres merveilles. Des bronzes immenses, à l’exemple de “Parole portée”, une sculpture érigée en hommage aux victimes du terrorisme, exposée dans le jardin de l’Hôtel National des Invalides à Paris en 1998.
Même si Nicolas Alquin s’illustre majoritairement dans la sculpture, il excelle également dans le dessin à l’encre. Exclusivement pour nous, il a ressorti des grandes encres sur textile non tissé ainsi que des plus petits dessins de couleurs.
Assis auprès du feu, nous avons pu admirer ses différentes réalisations tout en l’écoutant. Un moment suspendu, où nous nous sentions si proches de l’artiste et de sa création.
Présence et mystère… C’est bien les deux mots qui nous viennent à l’esprit lorsqu’on contemple les œuvres de Nicolas Alquin.
Caroline Becker
Pour découvrir le 1er article d’Itinéraires de la création consacré à Hélène Mugot, cliquez sur ce lien :