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L’empreinte de Claude Viallat

Claude Viallat est né à Nîmes en 1936. (1) Comme la plupart des peintres au début de leur carrière, il a peint des toiles en cherchant d’abord une composition au crayon sur une feuille de papier. Puis il reportait cette composition sur une toile ; mais alors il déplorait toujours le décalage entre ce qu’il avait dessiné et ce qu’il avait peint. Rapidement, il a décidé de travailler avec la même forme en prenant la plus simple, la plus élémentaire et la plus immédiate. Cette figure de base est un long rectangle aux angles adoucis qui évoquent un haricot ou un osselet.
Publié le 16 mars 2015

montage de l’exposition claude viallat une rétrospective, atrium richier musee fabre Montpellier printemps 2014

Claude Viallat définit cette figure de base comme étant « de contenu neutre et de découverte fortuite ». En même temps, il a caractérisé cette figure comme présentant une analogie avec une palette (l’insigne de l’artiste). Pour Claude Viallat, « l’œuvre n’est que l’image du travail ». C’est plus important que le sujet. Des critiques d’art tels que Marcellin Pleynet et Yves Michaud ont étudié en profondeur l’art de Viallat à partir du primitivisme. Il est clair que la sexualité est à un certain niveau un facteur important même si le « sceau » de l’artiste n’est pas une image de quelque chose mais un simple « pattern ».

Puis il peint sur des toiles non tendues sur châssis, il choisit n’importe quel tissus, des immenses étoffes comme une couvertures, des tapis de table, des rideaux, des parasols, des tentes…Il cherche une liberté. A partir de ce moment les tableaux n’ont ni cadre ni structure de support. Il sont faits pour être accrochés comme une toile directement au mur. L’artiste est libéré de composer sa toile sous forme d’un tableau rectangulaire. Cette idée permet de nombreuses solutions de collages, assemblages et des surfaces peintes parfois imposantes. C’est l’époque des années 70 où il fait partie du groupe Supports-Surfaces. (2)

Claude Viallat travaille beaucoup ses couleurs. Elles sont d’ailleurs très riches autant que sont riches le caractère et les formes données par les tissus divers qu’il emploie. Ses couleurs sont lumineuses. Elles ont une parenté avec Cézanne et surtout Matisse. Malgré cela, les formes qui se multiplient sur la toile d’une manière étrange conservent presque les mêmes configurations. Ces formes se répètent à intervalles réguliers. De par leur ordonnance, et du fait de leur multiplication et de leur répétition, elles prennent une grande beauté et acquièrent une grande sérénité.

empreintes sur tissus ©Ludovic Godard – UFC

Le fond, la structure et l’acte de répétition ne sont pas subordonnés l’un à l’autre mais en revanche ils forment un tout et donnent à l’œuvre un rythme vivant et cohérent. Cependant, il faut dire que ces formes ont davantage pour but une décoration qu’un symbolisme. Laissons maintenant parler l’artiste : « Travailler la couleur en tant que marquant, en tenant la valeur et le ton comme obligatoires, en ne lui conférant aucune symbolique, impose de lui donner la préférence, mais de ne pas particulariser, ni de l’accepter dans sa matérialité. Elle n’est plus alors un véhicule d’expression mais celui du travail qui l’utilise et la produit, pâteuse, fluide, ductile, solide ou poudreuse. »

« C’est aussi ne pas séparer la couleur de la matière, considérer l’une et l’autre comme intimement liées, matière-couleur et couleur-matière indissociables. C’est considérer le transparent comme la couleur, et l’utiliser comme tel ; ne pas séparer la couleur de l’espace et l’espace de la matière. C’est faire l’archéologie de nos connaissances en les répertoriant dans leurs effets, en les analysant dans leurs productions, en reconnaissant leurs inter-actions et les transformations que celles-ci produisent. »

Ce serait tronquer l’œuvre de Claude Viallat si on ne parlait pas de toute une partie de son travail qui consiste à tisser, à faire des nœuds, des filets, à arranger des objets dans un certain ordre établi et même de faire des empreintes sur des galets.
« Les lignes, points, formes, nœuds, volumes sont de formes simples puis complexes, combinatoires, signifiantes, symboliques, qui ne peuvent se compliquer de toutes les intentions, les relations et les histoires dont on les chargera, mais ils restent aussi avant tout les gestes élémentaires qui les suscitent. »

Empreintes sur écorces

Texte de Renée Moineau issu des Chroniques d’Art Sacré n°12  ©SNPLS / Art Sacré



1. Claude Viallat suit Simon Hantaï de 10 ans et Sam Francis et Jackson Pollock de 30 ans.
2. Supports-Surfaces est un groupe d’artistes des années 70 à la tête duquel nous trouvons Vincent Bioules, Gauthier, Garouste, Pincemin mais aussi Parmentier, Dezeuze et Saytour.

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