De ses voyages et son parcours à l’international, Chantal Colleu-Dumond a gardé une grande ouverture dans son intelligence du monde et des choses, et son souhait est de « donner une image de la France qui bouge » tout en se préservant de l’écueil dangereux de l’industrie culturelle. Pour elle, « la clé c’est l’humain ». Il y a à Chaumont-sur-Loire une atmosphère unique, et dans ce lieu ouvert 365 jours par an s’engage un dialogue profond et sensible entre l’architecture, les jardins, et l’art contemporain.
En cette époque marquée par la crise sanitaire, chacun peut venir se ressourcer dans ce site où s’exprime une certaine vision de l’art, en « savourant un extrême bonheur » à travers une « totale immersion dans la beauté ». « Nous avons tous été fragilisés » constate Chantal Colleu-Dumond, mais le Covid a suscité une « réflexion sur le monde ». Dès leur arrivée dans le havre de paix qu’est Chaumont, il y a une baisse de tension chez les visiteurs, face aux couleurs, aux fleurs, aux œuvres, aux multiples sollicitations visuelles et sensorielles. « Nous sommes très aidés par les arbres, la floraison, nous composons avec la nature, qui est un antidépresseur naturel ! »
« Chaumont se renouvelle en permanence. Et plus cela va, plus je considère que j’ai eu beaucoup de chance ! Les possibilités de jouer sont infinies. »
En 2007 elle est chargée de la mise en place de cet établissement public d’Etat (qui dépend de la région – Centre Val de Loire) comprenant le château de Chaumont-sur-Loire, monument historique, et le Festival des jardins, très évolutif, en réunissant les deux entités dans cette aventure, sous le signe de l’Art et de la Nature. « Ce n’est pas forcément facile, car c’est un établissement public avec des règles. Mais Chaumont se renouvelle en permanence. Et plus cela va, plus je considère que j’ai eu beaucoup de chance ! Les possibilités de jouer sont infinies. »
En ce lieu qui sollicite les cinq sens, la gastronomie a sa place, et ceux qui viennent à Chaumont y sont « nourris » au propre comme au figuré. L’environnement calme propose d’entrer dans une temporalité plus longue, en développant cette dimension d’accueil, d’hospitalité, avec notamment l’ouverture d’un hôtel l’année prochaine, pour prendre le temps de visiter pendant deux jours.
Il est également envisagé une programmation de rencontres et de débats culturels, autour de l’art, la nature, l’environnement. Toutes ces propositions se rejoignent pour révéler la « philosophie sous-jacente de Chaumont » et surtout cette « aventure en renouvellement permanent ».
Evènement toujours très attendu, la Saison d’art de Chaumont-sur-Loire réunit aussi bien des artistes « géants » reconnus, que des artistes à découvrir, ou des « revenants ». Les pépites sont innombrables et le dialogue avec le site extrêmement fin et ajusté. Cette année, on retrouve Pascal Convert avec une étonnante installation de livres cristallisés dans la bibliothèque, une étrange Chambre intérieure et ses trois Anges silencieux en verre dont le regard absent semble nous suivre…
Autre surprise, l’ensemble d’œuvres de Rebeyrolle qui donne à voir des facettes méconnues de l’artiste, en lien avec l’observation de la nature, mêlant pigments et branchages comme des peintures-sculptures. Une sélection d’estampes de Dubuffet montre son regard attentif sur les brindilles, les graviers, et autres textures issues de matériaux de la nature, dans une approche qui télescope l’infiniment grand et l’infiniment petit.
On retrouve la poésie mélancolique de Stéphane Guiran avec ses fleurs de quartz, ou la grande et belle tenture d’El Anatsui – qui revient pour la troisième fois, avant de découvrir plus loin, dans l’obscurité, l’installation de Chiharu Shiota, réseau de fils noirs surplombant une sorte de continent ou d’île. Sans oublier les nombreux artistes contemporains qui se révèlent encore cette année à Chaumont-sur-Loire…
« C’est un merveilleux lieu, très inspirant avec quatorze jardins et 32 hectares » souligne Chantal Colleu-Dumont avec un sourire. « De cet endroit composite et original, les gens ressortent différents ; ils vont se parler. » S’exprimant en termes choisis, pensés, précis, Chantal Colleu-Dumont est attentive à chaque détail et à l’harmonie constante qui doit régner, au dialogue parfait des œuvres avec le site historique et la nature, fruit d’une exigence constante. Elle est comme un « chef d’orchestre » devant sa partition musicale : rien n’est laissé au hasard, l’inspiration est toujours présente et donne un vrai souffle au site.
« Chaumont est un lieu où l’on respire ; il y a une volonté pour que tout soit dans une harmonie paisible. »
Valérie de Maulmin
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